Extrait du journal

La manière en quelque sorte absolue dont j aurai exercé ma pensée me donne volontiers l'illusion qu'e l'esiprit est une chose autonome, qui échaippe aux lois de l'existence matérielle. Ce m est toujours une surprise et un peu d'humiliation quand je constate que l'esprit peut connaître la fatigue j comme le corps et avoir, comme lui, besoin de « se reposer ». Je suis encouragé dans ce sentiment par le fait qu 'à mon âge je me sens l'esprit aussi vivace qu'à vingt-cinq ans et ne perçois aucun signe avertisseur de son déclin. A ceux qui m'informent qu' « il faut bien mourir », je serais assez prêt à répondre, comme le Régent à Dubois, s'.écriant : « Monseigneur, ill faut bien que je vive. — Je n'en vois pas la nécessite. » Mon esprit prendrait aisément à son compte ce mot qu'on prête à un philosophe : « Je sais que je dois mourir, mais je ne le crois pas. » Et, en effet, je sais que cette croyance à l'autonomie de mon esprit est une iidée fausse ; je tiens qu'il est matière et périra avec mon corps. Mais je me demande si tous ceux qui auront vécu principalement par fesiprit n'auront pas «nourri cette erreur, quitte à l,a condamner. Le cœur de tout intellectuel est plus ou moins spiritualiste....