Extrait du journal
Avant-hier, à deux heures, à l’Académie des sciences, M. Pasteur a lu, au milieu d’une vive émotion, un mémoire dans lequel il annonce qu’il a découvert le remède contre la rage. Ayant remarqué que le virus rabique perdait de sa force chez certains animaux, tels que le singe, et prenait au contraire plus d’intensité chez d’autres, comme le lapin, voici de quelle façon l’illustre savant a procédé: « J’ai d’abord, dit-il, pris du virus dans le cerveau d’un chien mort de la rage ; je l'ai inoculé à un premier singe : celui-ci est mort : j’ai inoculé son virus, déjà atténué, à un second singe, et le virus du second à un troisième ; après ce que j’appellerai ce troisième passage, j'ai obtenu un virus d’une inocuité presque com plète. Ce dernier virus, je l’ai inoculé à un premier lapin ; il a repris un peu de force, à un second, chez lequel il a encore augmenté, à un troisième, à un quatrième, jusqu’à ce que il arrive à sa force maxima. Par ce moyen, j’ai obtenu des virus à des degrés très diffé rents de nocuité, — absolument comme, en les élevant dans des milieux chimiques, j’avais obtenu des microbes du charbon plus ou moins nuisibles. Seulement ici, j’ai élevé le virus de la rage, — et son microbe encore inconnu, mais dont l’existence me paraît certaine, — dans des milieux animaux, présentant chacun une aptitude différente à contracter et à supporter la maladie. » Et M. Pasteur con clut : « Je crois qu’on pourra rendre peu à peu, par ces procédés d’inoculation, les chiens réfractaires à la rage; que, par conséquent, dans un temps, très éloigné sans doute, mais certain, la rage disparaîtra de la terre et qu’en attendant je pourrai empêcher l’incubation de la rage chez toute personne qui, ayant été mordue par un chien enragé, voudra bien accepter mes trois petites inoculations. » — Par cette seule découverte, M. Pasteur aura rendu assurément plus de services et apporté plus de gloire à la France que la République actuelle, avec tous ses politiciens, ses légis lateurs, et ses bavards ! — La rentrée du Parlement s’effectue, d’ailleurs, au milieu de la plus profonde indifférence. « L’opinion, dit la France, n’attend plus rien de cette législature, à laquelle pourtant elle n’avait pas ménagé son crédit. Elle ne lui demande plus que de bien mourir, et voilà pourquoi elle assiste, spectatrice indifférente, à la re prise de travaux d’où elle sent que rien de grand et de fécond ne sortira pour la démo cratie. » L’Angleterre, après avoir accepté que la conférence pour les affaires d’Egypte ne por tât pas exclusivement sur la question finan cière, paraît éprouver quelque hésitation, au jourd’hui qu’il s’agit d’en déterminer le pro gramme. Le bruit court même que le Foreign Office a définitivement repoussé les conditions posées par le Gouvernement français à son acceptation de la conférence. Que résultera-til de cet imbroglio ? Toutes les hypothèses sont permises. Il est un point cependant qui mérite attention, c’est que l’Angleterre com mence à fatiguer l’Europe par ses lenteurs et ses atermoiements calculés. On s’explique dif ficilement qu’a près avoir sollicité la réunion de la conférence, elle mette tous ses soins à l’ajourner, voire à faire avorter le projet. Le Mémorial diplomatique prétend qu’il a été question d’une participation éventuelle de l’Espagne aux travaux de la conférence. « L’Espagne, dit notre confrère, n’est pas in téressée dans cette question, au même degré que les autres puissances méditerranéennes, et c’est précisément cette situation qui a paru la rendre plus propre à jouer un rôle utile dans la future pacification de l’Egypte. De...
À propos
Fondées en 1843, Les Tablettes des Deux-Charentes furent une parution bihebdomadaire (puis trihebdomadaire) vendue dans les départements de la Charente et de la Charente-Maritime. Le journal disparaîtra un siècle plus tard, en 1944.
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