Extrait du journal

mort a épargnés, mais que de terribles blessures ont cloués sur {un lit d’hôpital ou marqués du sceau indélébile d’une fatalité sans merci. Combien, enfin, pour essayer de con jurer l’étendue du désastre et de protéger la vie de leurs camarades ont prodigué sans compter, au milieu de l’effroyable tourmente, un sang qui n’aurait dû couler que pour la défense du pays et l’honneur du drapeau ? Nos annales maritimes s'ouvriront au récit de la funèbre tragédie du Jéna : on y verra une fois de plus que notre armée de mer est comme notre armée de terre une des plus nobles écoles de courage, de dévouement et de devoir. Ce qu’elle est aujourd’hui, nous pou vons l’affirmer, elle le sera dans l’avenir.. Les grands exemples font les grandes vertus et de la semence du sacrifice sort le développement indéfini de l’idéal et de la grandeur morale de l’humanité. Un jour, aux Etats-Unis de l’Amérique du Nord, dans une cérémonie publique, dont la nôtre, par certains côtés, rappelle le souvenir, le président Lincoln, faisant l’oraison funèbre de soldats morts eux aussi au service de leur pays, prononça ces fortes paroles : « Nous ne venons pas ici pour consacrer les morts, nous venons leur demander de nous confimer dans nos devoirs. » Que chacun médite les termes de cette admirable leçon ; comme Lincoln, nous demandons nous aussi à nos glorieux morts que nous saluons bien bas, la tris tesse au cœur et les larmes aux yeux, de nous raffermir dans la religion du cou rage et le culte du devoir. Discours du Ministre de la Marine. Le sort cruel nous frappe à coups redoublés, et l’on dirait même, à voir la soudaineté et l’effrayante progression de ses coups, qu’il est comme exaspéré par le tranquille courage, par la haute sérénité, par le noble esprit de sacrifice avec lesquels nos marins, depuis les chefs juiqu’aux matelots, envisagent et su bissent ces catastrophes, dont ils sont les témoins aujourd’hui et dont ils peuvent demain être les victimes... Messieurs, ce n’est pas l’heure ici de longs discours, et pour ma part, je me sentais incapable de parler plus long temps, je voulais, je devais seulement avec une profonde affliction personnelle, avec le sentiment de tristesse et d’émo tion qui a envahi toute la grande famille maritime, apporter le respectueux salut des pouvoirs publics, du pays tout entier, et, je puis le dire, de toutes les nations ci vilisées. aux victimes comme aux héros de la catastrophe, car ces sombres tableaux, ces lugubres spectacles de désolation et de mort sont toujours dans notre marine, et j'ajouterai dans notre France, noble ment illuminés par l’héroïsme des sur vivants. Le gouvernement de la République n’oubliera aucun des grands devoirs que lui imposent à la fois ici la douleur, l’ad miration et l’humaine solidarité; il devra aussi, faible consolation devant ces chars mortuaires, mais impérieuse obligation...