Extrait du journal
Nous n’en sommes plus au temps du mot célèbre de Lamartine : « La France s'ennuie », il y a beau jour en effet quelle a commencé à s’ennuyer et à s’irriter aussi ; elle est présentement,dans la pé riode de l’écœurement politique et les raisons qui ont motivé la démission de Rivais, député de l’Aude, résume bien l’état d’esprit du pays. « — Je ne comprends pas, a dit M. « Rivais. le rôle du Parlement tel qu’il « est aujourd’hui. La politique a tout en« vahi, déborde partout et prime tout. « On ne fait que de la politique et les « politiques seuls ont raison. Moi, j’ai « l’effroi des politiciens. » La France aussi a l’effroi des politi ciens, elle voit avec horreur que la poli tique prime tout, déborde partout, en vahit tout.Plusieurs fois déjà nous avons fait toucher du doigt ce mal parlemen taire qui s’étend comme une gangrène inguérissable, plusieurs fois nous avons entendu vibrer le cœur de la France d’indignation et de fureur ; c’est que le pays sent bien qu’entre lui et les politi ciens le fossé se creuse de plus en plus, il n’y a pas communion d’idées entre l’électeur et l'élu. Ce n’est pas pour la besogne stupide que l’on fait au Parle ment que le peuple a pris la peine d’élire des représentants. « — Je suis un brave homme, dit « M. Rivais, venu de son pays avec un « mandat qu'il a rempli de son mieux, « en tonte loyauté, avec une conscience <( scrupuleuse, mais qui voyait dans la « Chambre un ensemble de représen« tants de la première nation du monde, « préoccupés de maintenir dette nation « à son rang par l’étude sérieuse et ap« pliquée des questions économiques et « sociales. » M. Rivais a été un député de la majo rité, un ministériel tant que cela lui a été possible ; il n’avait qu’à se laisser vivre et suivre le courant comme les ca marades, mais il le dit lui-même : « Il est un brave homme » et il a compris que les braves gens, à un moment donné, ne peuvent plus frayer avec certaines per sonnes. Comme la politique l’effraie, comme les luttes le troublent, il n’a pas eu l’es prit assez combatif pour passer dans l’opposition ; il a craint aussi peut-être d’avoir à batailler contre d’anciens amis de la majorité, il aurait voulu être bien avec tout le monde, c’était difficile, il a préféré donner sa démission — un peu à la façon du tambour-major, il est vrai, qui disait : le gouvernement s’arrangera comme il pourra, — pourtant avec di gnité et non sans émettre quelques bon nes vérités. Il y a un peu de naïveté dans son cas, mais on ne lui en sait pas mauvais gré ; les naïfs politiques méritent toujours certains égards : « On n’obéit, dit-il, « qu’à des calculs politiques, la solu« lion pacifique du règlement des rap« ports entre le capital et le travail, par « exemple, qui presse et qui importe « tant, fait moins l’objet des préoccupa« lions de la Chambre qu’une querelle « quelconque entre partis politiques. » Eh oui, il y a nombre de questions im portantes à traiter, mais en dehors des rares députés « braves gens », où sont donc — « les représentants de la pre« rnière nation du monde travaillant à « remettre la France à son rang. » Les plaintes élégiaques de M. Rivais, les aspirations bucoliques du député de l’Aude ne sont pas sans charmes, mais à notre époque, ce n’est plus sur le luth champêtre ou la lyre du troubadour qu’il faut chanter les malheurs de la Patrie. Qu’aurait fait M. Rivais dans la dis cussion « des rapports entre le capital et le travail », termes vagues qui ne ren ferment pas une idée facile à saisir de ces rapports ; qu’aurait fait M. Rivais dans la question des Congrégations dont il ne parle pas et qui cependant est la plus importante des discussions ? On ne sait, mais sans doute il eût déploré la sottise des uns, la perversité des autres, il eût vu s’accroître son « effroi des poli ticiens » et il eût laissé faire quand même. Combien sont-ils à la Chambre qui pensent comme M. Rivais et cependant suivent la pente sur laquelle le ministère les a lancés; combien sont-ils qui, s’ils l’osaient, diraient à la majorité : « Vous obéissez à des calculs politiques, je me - etire de vos rangs pour- aller apporter...
À propos
Fondé en 1845, le Mémorial judiciaire de la Loire est, comme son nom l’indique, un journal judiciaire. D’abord hebdomadaire puis quotidien, il est rebaptisé L’Avenir républicain en 1848, puis L’Industrie en 1852, puis le Mémorial de la Loire et de la Haute-Loire en 1854, nom qu’il raccourcit quelques quatre-vingt-ans plus tard en Le Mémorial. Collaborationniste, le journal est interdit en 1944.
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