Extrait du journal

La dernière grâce que nous attendions de Dieu en ce monde, c’est la grâce d’une belle mort ; j’entends d’une mort conforme au vœu de notre vie et à l’aspiration de notre cœur. A cet égard, il me semble bien que les vœux de Francis Jammes aient été comblés. Les journaux nous apprennent en effet que c’est le 2 novembre, dans l’après-midi, qu’il s’est endormi, en touré de sa femme et de ses cinq enfants. Ils ajoutent que l’heure où il perdait connaissance était l’heure même où, à Lyon, l’une de ses filles prenait le voile des Sœurs blanches... Et nous voici pénétrés d’émoi et de surprise devant ce lit funèbre où il semble que de soudai nes banc heurs se substituent aux crêpes que l’on atten dait; oui, nous voici comme ces disciples du Christ que les vieux peintres nous montrent courant au tombeau et s’arrêtant, muets de stupeur, en le trouvant vide et gardé par des Anges. Nous ouvrons alors le Deuil des Primevères et nous relisons la prière (pie, il y a presque quarante ans, le poète adressait à Dieu pour lui demander « que le jour de sa mort fût beau et pur ». Bien jeune encore, il n’avait pas donné à la foi catholique celte adhésion totale que n°us lui vîmes depuis. Son âme, engagée dans la tendre matière terrestre, y adhérait par toutes sortes de liens, 'lais, baignée d’une candeur franciscaine, ne semble-t-il...