Extrait du journal

L'air est tiède. Le soleil boude, dans un cortège de flocons grisâtres qui tapissent de linge sale le plafond de la capitale. Allons flâner sur lés quais et plonger un regard maussade dans les boîtes à bouquins. On n'y trouve plus grand'chose, dans ces boîtes où gémissent de fastidieux volumes, défendus par d'opiniâtres couches de poussière et où s'ébattent, dans de redoutables sarabandes, tous les microbes de la création. On y trouve l'inquiétude, les déceyances amères ; on y savoure l'impuissance humaine. Que d'efforts formidables, que de tentatives insensées ont abouti à cette foire aux puces de l'esprit humain ! Voici un très vieil essai de cosmogonie recélant l'absolue vérité et rivant son clou à Dieu comme à ses prophètes. Voici les chroniques véridiques d'un moine moyenâgeux que l'Histoire, la grande Histoire officielle a négligées outrageusement. Plus loin, ce petit livre aux feuilles jaunies, semées de moisissures, c'est un plan de société future propre à assurer le bonheur des hommes. Foin des apôtres et de l'alchimie sociale ! Et puis voici des vers I Des vers qui chantèrent dans des mémoires abolies, des vers qui furent suscités par les charmes de beautés fragiles, ravalées par le néant. Tout cela, proses, poèmes, métaphysiques, utopies, mémoires, pamphlets, pages glorieuses d'hier, dort d'un sommeil lourd qu'accable la revanche des infiniments petits. Tristesse des choses du passé 1 Parbleu ! Habent sua tata libelli. ii<...