L’annonce de ce corps expéditionnaire dont la mission gardée secrète jusqu’au dernier moment est tout simplement d’éradiquer le banditisme en Corse réjouit plusieurs journaux. Le Petit Parisien n’hésite pas à comparer les malfrats à des « chiens enragés » et fustige tous ceux qui les protègent – ou simplement, les encensent.
« J’ai fait un rêve étrange la nuit passée... J'ai rêvé que je parcourais un pays extrêmement pittoresque, mais aussi extrêmement dangereux...
Ce pays, en effet, était infesté de chiens enragés qui couraient en liberté, la bave aux dents, à travers les villes et les campagnes... Les chiens enragés faisaient, comme on le conçoit, d'innombrables victimes... Cependant, il était interdit de les abattre...
Cependant, de très braves gens se croyaient obligés de nourrir ces bêtes meurtrières et de les nourrir grassement... Cependant, des gens intelligents disaient, en tremblant de peur : – Oh ! Les chiens enragés doivent vivre ! – Celui qui oserait tuer un chien enragé serait voué à un sort fatal...
Enfin, des gens cultivés, aimables, optimistes, s'écriaient : Il ne manquerait plus que ça qu'on touche à nos chiens enragés... Nos chiens enragés sont d'un pittoresque formidable. Nos chiens enragés sont magnifiques... Et ils sont littéraires !... Et ils sont artistiques... Car nos chiens enragés ne sont pas des chiens enragés ordinaires... Ils sont exceptionnels ! Ils sont étonnants !... Et, s'ils sont enragés, ils ont tout de même une Intelligence, un chic, un courage extraordinaires… »
La plupart des bandits vivent dans le sud de l’île. Ils sont connus, tout comme le sont leurs villages d’origine. Quatre hors-la-loi sont ainsi particulièrement visés par le plan d’attaque du préfet.
« Les opérations sont dirigées actuellement vers quatre centres : le canton de Zicavo, celui de Sari-D'Orcino, où Spada a établi son quartier général ; le canton de Vico, résidence de Torre et de Caviglioli neveu, et les environs de Guitera, secteur de Bornéa, ancien gendarme.
Ceux-là sont les plus dangereux ; lorsqu'ils seront tombés en notre pouvoir, les autres se soumettront certainement, Les opérations dureront le temps qu'il faudra.
Si l'on examine la carte de la Corse, on constate que les régions où règne le banditisme sont bornées au Nord par une ligne allant approximativement de Piara, à l'est d’Ajaccio, à Porto-Vecchio. »