Écho de presse

Notre-Dame-de-la-Garde, protectrice de Marseille

le 12/06/2019 par Pierre Ancery
le 08/08/2018 par Pierre Ancery - modifié le 12/06/2019
Notre-Dame-de-la-Garde, carte postale de 1910 - source : WikiCommons

La basilique Notre-Dame-de-la-Garde, souvent surnommée « la Bonne Mère », fut consacrée le 4 juin 1864. Gardienne des marins et des pêcheurs, elle est depuis devenue l'emblème de Marseille.

Voici un siècle et demi qu'elle se dresse fièrement sur les hauteurs de Marseille, à cheval entre les quartiers du Roucas Blanc et de Vauban. Véritable gardienne de la ville, la basilique Notre-Dame-de-la-Garde (« la Bonne Mère » de son surnom) a été érigée entre 1853 et 1864.

 

Elle fut construite sur les bases d'un fort du XVIe siècle construit par François Ier, à l'endroit où se trouvait une chapelle édifiée en 1214, déjà appelée « Notre-Dame-de-la-Garde ». C'est dans cette chapelle qu'au cours des siècles, les marins ayant échappé à un naufrage venaient faire leurs grâces et déposer des ex-votos.

Fort et chapelle de Notre Dame de la Garde à Marseille, du côté faisant face à la mer, dessin de Jules-Adolphe, 1847 - source : Gallica-BnF

Important lieu de pèlerinage catholique, le site est fréquenté depuis longtemps, comme l'explique en 1851 Le Journal des villes et des campagnes :

« Quel Marseillais n’a gravi plus d’une fois le sentier rocailleux qui conduit à Notre-Dame-de-la-Garde ? Quel marin, ballotté par la tempête en présence du port, ne tourne ses regards pleins d’espérance vers le sanctuaire de la vierge protectrice des nautonniers ?

 

Et lorsqu'un fléau destructeur promenait ses ravages dans notre cité, quel est l’incrédule qui n’a pas été vivement ému au spectacle de ce peuple immense qui faisait retentir les airs de ses supplications et formait un cortège d'honneur à la statue de Notre-Dame portée en procession dans nos rues ? »

Notre-Dame-de-la-Garde, patronne des marins, estampe, 1838 -source : Gallica-BnF

L'endroit est donc idéal pour construire un nouveau lieu de culte. Les fonds sont trouvés, de même que l'architecte, Henry Espérandieu. En septembre 1853, La Gazette de France raconte la pose de la première pierre :

« Dimanche 11, fête du Saint-Nom de Marie, la cérémonie de la bénédiction et de la pose de la première pierre de la nouvelle église de Notre-Dame-de-la-Garde de Marseille, s’est faite avec beaucoup de pompe au milieu d’un concours prodigieux de fidèles, malgré le vent qui soufflait avec force [...].

 

La procession étant parvenue au lieu de la station, Mgr l’évêque précédé des curés et chanoines, et suivi du maire et conseil municipal, est monté à la chapelle : après une visite au Saint-Sacrement, le cortège s'est dirigé sur l’estrade dressée sur le fort pour la cérémonie [...].

 

Pendant la bénédiction, le fort a été illuminé par des feux de Bengale dont l’effet était saisissant. Cette grande et touchante solennité, à laquelle assistait une foule pieusement recueillie que la Gazette du Midi, à laquelle nous empruntons ces détails n’évalue pas à moins de 50 à 60 000 âmes, s’est terminée à six heures et demie. »

C'est aussi à cette époque que la ville se transforme, lançant la construction d'édifices importants comme la Bourse ou la préfecture. L'édification de la basilique, elle, s'achève en 1864. De style romano-byzantin, elle est consacrée le 4 juin par le cardinal Villecourt, devant un immense cortège de jeunes garçons et de jeunes filles vêtues de blanc.

 

Le cardinal Donnet prononce quant à lui un discours dans lequel il rend hommage à l'histoire du lieu :

« Vous savez, mes très chers frères, les abondantes bénédictions et les grâces qui ont découlé de ce sanctuaire sur la cité et sur tous les pays où nos marins vont porter les souvenirs de la reine des cieux.

 

Nous avons lu le récit des conversions obtenues, des infirmités guéries, des misères adoucies ; il nous semble en tendre les échos d’alentour répéter un hymne de reconnaissance à celle que nous appelons la mère des miséricordes. »

Très vite, les habitants de la cité phocéenne vont chérir leur basilique. En 1869, Le Petit Marseillais s'enthousiasme de l'arrivée d'une statue monumentale de la Vierge pour surmonter la nouvelle chapelle.

« C’est sur la flèche de ce monument que, dans quelque temps, s’élèvera la statue de la Vierge, nouvellement arrivée, qui, par le mouvement de la main, semblera bénir l’antique cité, son territoire aujourd’hui si frais, si verdoyant, et les flots azurés de cette mer, trésor du commerce et de l’industrie. »

En mars 1871, lorsque se forme la Commune de Marseille, les insurgés réfugiés dans la préfecture vont se retrouver sous le feu des batteries installées au fort Saint-Nicolas et à Notre-Dame-de-la-Garde. Cette dernière va y gagner un nouveau surnom, moins amical : « Notre-Dame-de-la-Bombarde ».

 

Peu à peu, le lieu devient un des endroits les plus visités de la cité phocéenne. Toutefois, en 1876, Le Petit Marseillais explique que la basilique a beau être fort goûtée des pèlerins et des touristes, son accès demeure fort difficile : Notre-Dame-de-la-Garde est en effet juchée à 149 mètres d'altitude.

 

En 1892, un funiculaire est donc construit. L'Intransigeant commente :

« On sait combien était pénible l’accès de Notre-Dame-de-la-Garde. Ces difficultés viennent de disparaître par suite de l’installation de deux ascenseurs, dus à M. Meslin, dont l’installation, commencée en janvier 1890, vient d'être terminée.

 

De la gare au sommet, la hauteur que franchissent ces ascenseurs est de 84 mètres. Les ascenseurs montent, descendent et s’équilibrent par le système dit “à balance d’eau”. Ils sont soutenus par quatre câbles. Ils comportent deux cabines pouvant contenir quarante personnes chacune.

 

Les dernières expériences ont eu lieu samedi, et les ascenseurs ont fonctionné hier. »

Photo du funiculaire facilitant l'accès à la basilique, autour de 1895 - source : WikiCommons

Le funiculaire restera en activité jusqu'en 1967. Détruit pour cause de non-rentabilité, il aura transporté 20 millions de passagers pendant 75 ans.

 

Site classé depuis 1917, la basilique, elle, est toujours autant prisée des visiteurs. L'écrivain marseillais André Suarès lui rendit hommage en 1931 dans Marsiho, ouvrage consacré à sa ville natale : « Notre Dame de la Garde est un mât : elle oscille sur sa quille. Elle va prendre son vol, la basilique, avec la vierge qui lui sert de huppe... »