La douloureuse intégration des Polonais en France
Dans les années 1920, l'immigration polonaise, coordonnée par les compagnies minières pour la reconstruction du pays, n'a pas bonne presse en France.
Durant l'entre-deux-guerres, les Polonais sont venus massivement travailler dans les mines du Nord : ils sont plus de 500 000 à émigrer en France, dont près de la moitié dans le Nord-Pas-de-Calais. C'est la plus forte immigration dans l'hexagone, après l'immigration italienne (voir notre article).
Recrutés notamment par les compagnies minières pour participer à la reconstruction du pays, les travailleurs polonais ne sont pourtant pas vus d'un bon œil : incompris, régulièrement vilipendés, ils sont considérés comme les principaux responsables de la baisse des salaires, et sont accusés d'être des bandits et des agents de propagande du bolchevisme.
Dans les années 1920, alors que le « bandit polonais » devient une figure récurrente dans la presse française, les représentants des groupements polonais ne ménagent pas leurs efforts pour faire accepter les « honnêtes travailleurs ». Ils se réunissent ainsi régulièrement pour rassurer l'opinion. En 1925, Le Rappel relaie leur déclaration :
« Mettent en garde l'opinion publique française contre toute tendance à généraliser les crimes commis sur le territoire français par des malfaiteurs d'origine polonaise ou munis de papiers de ressortissants polonais, ce qui ne peut que nuire profondément aux bons rapports entre les immigrés polonais en France et la population locale, d'autant plus que l'existence d'une “bande de bandits polonais” n'est nullement établie. […]
Sollicitent l'appui bienveillant du gouvernement français pour toutes organisations et œuvres tendant au développement moral et social des ouvriers polonais en France. […]
Prient le gouvernement polonais :
De veiller, lors de l'embauchage des ouvriers polonais par les missions françaises de recrutement de la main-d'œuvre en Pologne, à une sélection plus rigoureuse, faute de laquelle des éléments criminels ont réussi à s'infiltrer en France. »
Face à la défiance persistante de l'opinion, les ministères du Travail et de l'Agriculture se font fort de clarifier la situation en 1928 : quand et comment sont arrivés les travailleurs polonais ? Combien sont-ils, quels emplois occupent-ils ?
Le journal socialiste L'Homme libre rapporte :
« Les premiers ouvriers polonais furent introduits en 1907, pour l'agriculture ; leur nombre en 1914, s'était élevé à 20 000.
Au lendemain de la guerre, le recrutement de la main-d'œuvre étrangère étant devenu plus nécessaire que jamais, des traités et des conventions furent passés avec certains pays ; la première en date est la convention franco-polonaise conclue à Varsovie le 3 septembre 1919.
En même temps, des précautions ont été prises pour protéger le marché du travail national […].
La note du ministère du Travail indique que les services rendus par la main-d'œuvre polonaise sont des plus importants et que, “si, exceptionnellement, quelques mauvais sujets se sont introduits, la plupart d'entre eux n'ont pu réussir qu'en se soustrayant au contrôle exercé d'accord entre les deux gouvernements intéressés”.
Ce contrôle va d'ailleurs être renforcé en vue d'éviter à l'avenir toutes possibilités de fraude. »
Cependant, la période la plus douloureuse pour les émigrés polonais de France viendra plus tard : au cours de la crise économique des années 1930, plusieurs dizaines de milliers d'immigrés polonais seront ainsi renvoyés dans leur pays, entre licenciements prioritaires et rapatriements forcés.