1921 : Le Code de la Route entre en vigueur en France
Objet de longues discussions, le Code de la route voit le jour le 27 mai 1921. Depuis ce jour, tous les automobilistes de France doivent se conformer à son règlement.
En 1905, Jules Perrigot, président de l'Automobile Club des Vosges, publie un « règlement de bonne conduite automobile » articulé en dix articles, qui va inspirer, le 1er juin 1909, la création d'une commission afin d'élaborer un premier projet de règlement à destination de tous les automobilistes, applicable au niveau national.
Une première version d’un futur et hypothétique Code de la route est présentée fin 1911 et approuvée le 16 mars 1912.
Sa mise en application fait l'objet d'une consultation démocratique auprès des conseils municipaux et des collectivités locales, avant que le Conseil d'État ne soit également interrogé. Mais la Grande Guerre éclate et ajourne de fait ces discussions.
Il faut attendre presque dix ans, pour que le 27 mai 1921 un « décret concernant la réglementation de l’usage des voies ouvertes à la circulation publique » soit enfin promulgué. Le Code de la route est officiellement né.
Dans son édition du 3 juin, Le Progrès de la Côte-d'Or voit d’abord dans ces nouvelles règles de limitation de vitesse un moyen de « préserver les belles routes de France ». Compte tenu de la nature dudit Code, il s’agit d’un point de vue pour le moins original :
« Malgré tout, le code a eu pitié du revêtement de nos routes. Il défend leur peau.
Les véhicules d'un poids supérieur à 3 000 kilos ne pourront donc courir à n'importe quelle vitesse : il leur faudra modérer leur allure. Mais qui fera les procès-verbaux, au cas ou ces nouveaux monstres mouvants se livreraient à des fantaisies et s'amuseraient à courir à une allure d'éléphant dans l'eau ?
Le nouveau règlement défend encore la chaussée lorsqu'il prescrit à tout véhicule d'être muni de jantes d'une largeur telle que la pression maximum exercée sur le sol ne dépasse pas 150 kilos par centimètre de jante. »
Mais la constitution de règles et de lois communes à tous les utilisateurs des routes, quoique déjà longue et ayant entrainé de nombreux débats et ajournements au début du XXe siècle, remonte en réalité à encore un siècle auparavant – au temps des routes dites nouvelles et des cavaliers.
C'est en effet Napoléon Bonaparte qui, le premier, édicte en 1804 une série de règles concernant la circulation des véhicules et de leurs chevaux, en rendant notamment obligatoire l'usage du côté droit de la chaussée.
Un demi-siècle plus tard, le 30 mai 1851, la « loi sur la police du roulage et des messageries publiques » édicte un corpus très complet de règlements : ceux-ci concernent, entre autres, la forme des moyeux, la forme des bandes des roues, les mesures à prendre pour « régler momentanément la circulation pendant les jours de dégel », la saillie des colliers des chevaux, les modes d'enrayage, le nombre des voitures qui peuvent être réunies en un même convoi, l'intervalle qui doit rester libre d'un convoi à un autre, ainsi que les premières amendes – allant alors de cinq à trente francs – en cas d'infraction.
Avec l'apparition des premières automobiles, le département de la Seine rend obligatoire le 14 août 1893 la possession d'une « autorisation de conduire un véhicule motorisé », premier ancêtre du permis de conduire, pour tous les conducteurs. Cette initiative fera vite tâche d'huile.
En 1896, la carte grise et les plaques d'immatriculation font leur apparition, en même temps que les premières limitations de vitesse. Un premier « décret portant règlement sur la circulation des automobiles » voit le jour le 10 mars 1899, fixant de nouvelles règles au sujet des freins, de la sécurité des moteurs et réservoirs et de la disposition des appareils de conduite. Deux ans plus tard, en 1901, les premiers panneaux indicateurs sont mis en place entre Paris et Trouville, afin d'aider les conducteurs à se repérer plus facilement.
Vingt ans plus tard, tandis que le Code vient de faire son apparition officielle, il est déjà jugé trop complexe, trop touffu et inadapté au citoyen lambda, par une partie de la presse. Ainsi dans son édition du 14 juin, Le Petit Marseillais lui porte un jugement sévère :
« Ces prescriptions novatrices ont été très étudiées. Peut-être eut-on gagné à les rédiger moins longuement : elles tiennent trois colonnes du Petit Marseillais ! C'est beaucoup. C'est dire que parmi ceux qui devraient en prendre connaissance, çà et là, sur les murs d'une mairie villageoise, beaucoup n'en achèveront pas la lecture.
Elles énumèrent par le menu le gabarit des véhicules, prescrivent pour l'éclairage deux lanternes blanches à l'avant et une rouge à l'arrière. (Que de mal on aura – si on veut y tenir la main – pour obtenir ce feu rouge, pourtant si nécessaire à la protection de la vie humaine, des paysans obstinés aussi bien que des citadins négligents !). […]
Une centaines de lignes, c'est tout ce que peut supporter notre attention en pareille matière ; que des vulgarisateurs nous les donnent !
Il en coûterait peu aux associations de tourisme, aux sociétés départementales et urbaines de faire imprimer une plaquette instructive, destinée à mettre les usagers de la route moderne au courant de leurs droits et de leurs devoirs. »
Le 8 juin, dans un article intitulé « Le Code de la route – Comment les bureaucrates l'ont tripatouillé », L’Intransigeant se montre également critique vis-à-vis des prétendues adjonctions opérées par certains technocrates et grands fonctionnaires français de l’entre-deux-guerres sur le Code original.
« Réalisé patiemment et sagement par une commission composée d'ingénieurs de la route des plus distingués, d'usagers de la route expérimentés, de juristes spécialisés dans les questions de la route, l'infortuné code, au sortir des mains de cette commission, est parti exécuter dans les ministères de la Justice, de la Guerre, des Finances et de l'Intérieur, comme aussi dans les diverses sections du Conseil d'État, une sorte de tournée des grands-ducs : toutes les incompétences lui ont, à tour de rôle, flanqué des ronds de cuir jusqu'à ce qu'elles l'aient défiguré ! »
Il n'empêche que ce Code s'est avéré au fil des ans être une initiative élémentaire et inamovible, réussissant à réguler la circulation et à limiter drastiquement le nombre d’accidents de la route.
En 1958, une ordonnance modernisera le Code de 1921 en sanctionnant plus lourdement les excès de la vitesse et l'alcoolémie au volant.
Plus récemment, en 2011, une version actualisée du Code a vu le jour, plus adaptée aux contraintes actuelles de circulation et aux véhicules modernes.