Le quotidien de droite est révulsé par cette opération qui, selon les rumeurs, aurait même pris en otage des enfants de 14 ans. Même le journal radical L’Œuvre explique que « les mineurs polonais en révolte retiennent prisonniers plusieurs de leurs camarades français, ainsi que le chef porion et les deux porions qui, hier après-midi leur furent envoyés en ambassadeurs. »
Le journal de centre-gauche se demande de fait quel est le but des grévistes qui ont coupé le téléphone et l'électricité. Finalement, au bout de quelques dizaines d’heures, les grévistes finissent par remonter à la surface. Pour Le Populaire et L’Œuvre, c’est la descente de Kléber Leguay, l’un des dirigeants syndicaux confédérés, qui est parvenu à faire entendre raison aux grévistes.
Mais l’affaire n’en reste évidemment pas là.
La compagnie va consécutivement congédier 120 grévistes, et les meneurs, pour une grande part communistes, sont incarcérés à la maison d'arrêt de Béthune. Sept d’entre eux, tous Polonais, sont condamnés en septembre. La riposte est aussi immédiate du côté de l’Etat, puisque le décret d’expulsion est prononcé dès le 8 août. Il est alors accueilli favorablement par les grands quotidiens d’informations comme Le Matin, considérant dès le 9 août que :
« Ce qu'on peut et doit affirmer, c'est qu'il faut des sanctions impitoyables et que l'autorité a le strict devoir de réprimer sans faiblesse d'aussi scandaleux attentats. »
Le gouvernement s’appuie alors sur les syndicats réformistes (et ses dirigeants Pierre Vigne et Kléber Legay) pour tenter de justifier sa position :
« Mais, sur la demande expresse qui lui a été adressée par les délégués, il a précisé que l’on ne saurait confondre l’ensemble de la population laborieuse des mineurs polonais avec les agissements d’un petit nombre de meneurs ou d’égarés.
Le ministre est persuadé que conseillé par des organisations ouvrières qui placent avant tout la défense réelle et efficace des intérêts des travailleurs du sous-sol, les mineurs polonais comprendront l'avantage qu'ils ont à rester pour leurs revendications dans le cadre de la légalité. »
En effet, dans cette affaire, se joue aussi une fois de plus l’opposition frontale entre socialistes et communistes dans les régions du Nord, une confrontation qui va se poursuivre même après la signature du pacte d’unité d’action entre les deux partis ce même mois d’août.
Les journaux de gauche relatent aussi tous deux le combat des syndicats qui, sans arriver à arrêter l’expulsion, obtiennent que le rapatriement soit au moins pris en charge par la compagnie minière.
Les expulsions ont lieu dans les jours suivants, le premier convoi partant le 11. La plupart des journaux se contente de relater l'événement, en notant que l’expulsion s’est faite sans incidents, la majeure partie des ouvriers se détachant des meneurs selon L’Excelsior du 12 août 1934. Il est vrai que par crainte de résistances, d'importants dispositifs de maintien de l’ordre ont été mis en place. Pour L’Humanité, qui appelle à l’unité syndicale, c’est sous la pression de « leurs exploiteurs » que 600 des mineurs ont « désavoué » les mineurs grévistes.
La presse française est évidemment divisée sur ces événements : à droite ou à l’extrême droite, on voit d’un très bon œil l’expulsion des Polonais. Ainsi, Le Réveil du Nord se félicite du « nettoyage de la cité minière de Leforest ». A gauche, on dénonce le traitement réservé aux familles polonaises. La Dépêche de Toulouse, de centre-gauche, pose plus largement la question de la place des étrangers en France, en concluant :
« Comme pour tous les problèmes politiques et sociaux, il y a là une question de mesure et de bon sens. Elle impose à la France de se garder à la fois de la xénophobie et d'une imprudente faiblesse.
Elle impose aux étrangers de comprendre qu'en abusant de notre hospitalité ils la rendraient impossible. »