The Jazz Singer, premier film « sonore et parlant »
Le 6 octobre 1927, les Américains découvrent le premier film « sonore et parlant » de l'histoire. C'est un triomphe, qui ouvre la voie à une complète transformation de l'industrie cinématographique.
Le 6 octobre 1927, les Américains n'en croient pas leurs oreilles : pour la première fois, un acteur se met à parler à l'écran. Il s'agit du jazzman Al Jolson, grimé de noir pour interpréter un chanteur afro-américain. Il ne prononcera, au total, que 281 mots, mais The jazz Singer est une révolution.
En France, Le Journal s'enthousiasme :
« On a difficilement idée en France, en l'état actuel des choses, de la vogue immense que rencontre le film parlant et sonore aux États-Unis. Le Chanteur de jazz — The Jazz Singer — est la production qui a mérité de provoquer cette vogue par l'excellence de sa réalisation.
La vedette, Al Jolson, possède exactement la voix et le jeu qui conviennent le mieux à la reproduction synchrone des sons et des images. Lorsqu'il sera donné aux Parisiens d'entendre et de voir à la fois ce merveilleux artiste, ils auront, à proprement parler, une révélation. »
En France, en février 1929, tout Paris se presse à l'Aubert-Palace pour, enfin, aller voir (et écouter) Al Jolson — c'est un triomphe.
Des réclames fleurissent dans tous les grands journaux français : « Personne ne vous contredira si vous affirmez que Le chanteur de jazz est une pure merveille. C'est le seul véritable grand film parlant » ; « On refuse du monde à chaque séance ».
Sur le plan technique, le film n'est encore qu'une combinaison du cinéma et du phonographe : le Vitaphone, un système mis au point par les frères Warner, permet de synchroniser la bobine de film avec un disque.
Le Figaro explique :
« Le film en soi était analogue aux anciens films "muets", car les sons étaient enregistrés séparément sur des disques qui, pour avoir une durée égale à celle du déroulement d'une bobine de film, étaient de diamètre beaucoup plus grand (45 cm) que les disques usuels.
De plus, alors qu'un disque de phonographe ordinaire tourne à 78 tours par minute, ces "disques de cinéma" tournaient à 33 tours 1/3. Les inconvénients du système étaient multiples : synchronisme des sons et des images très relatif et dépendant de l'habileté, de l'opérateur de projection ; disques très lourds et fragiles compliquant l'exploitation et la manutention des films ; impossibilité d'une inscription des fréquences sonores élevées, qui caractérisent les timbres des instruments et des voix, en raison de la faible vitesse de rotation des disques ; enfin, "bruit d'aiguille" considérable.
Aussi au "son sur disque" préféra-t-on rapidement le "son sur film" employé aujourd'hui exclusivement. »
Une décennie plus tard, Paris-Soir rappelle que nul ne croyait alors au cinéma parlant.
« Ce fut cette victoire qui détermina la transformation de l'industrie cinématographique. »