51 millions de visiteurs vont se presser sur les rives de la Seine, entre le 15 avril et le 12 novembre 1900, pour assister à une exposition exceptionnelle. La France escompte ainsi impressionner les nations en présentant plusieurs centaines de bâtiments de tous styles. Seuls le Grand Palais, qui succède au palais de l'Industrie construit en 1855 et le Petit Palais qui lui fait face sont destinés à être pérennisés. Il s’agit aussi de mettre en valeur les richesses de l’empire colonial, de célébrer l’amitié franco-russe (d'où la construction du pont Alexandre III), d’affirmer l'excellence française dans le domaine technologique (l’invention du cinématographe ou la découverte du radium). C'est Paris « Ville lumière » qui s'expose et le style 1900 « académique et colossal, ne se confond aucunement avec l'Art nouveau, presque absent » (Pascal Ory) de l'exposition.
Le discours d’inauguration du président Émile Loubet est repris le lendemain dans Le Matin (15 avril 1900). Mais le récit que fait le jeune journaliste Gaston Leroux de sa visite est loin d’être louangeur : « Eh bien ! Il faut avoir le courage de le dire : ce qu’on a inauguré hier, c’est une salle des Fêtes, une allée sablée, quelques façades plus ou moins achevées, un pont où il ne manque plus un boulon ; mais ce n’est pas l’Exposition universelle de 1900 ». Il alerte le public : « Il est inutile de se presser attendu qu’elle n’est pas prête. » Dans le supplément gratuit de L’Écho de Paris (16 avril 1900), le point de vue de l’auteur de l’article rejoint celui de Gaston Leroux mais il se montre plus optimiste et prophétise « un bruyant succès ». Le journal Gil Blas (15 avril 1900), au ton assez allègre, chante « le petit air de fête et de printemps » à Paris en ce jour d’exposition, puis lui aussi ironise sur « les caisses d’emballage » qu’on inaugure et sur l’absence de personnalités : « Pas le moindre grand duc ! Pas le plus infime potentat colonial ! La foule ! La foule !… Et Loubet ! ».
Trois mois plus tard, les critiques semblent bien loin et le supplément du dimanche du Petit Journal (19 août 1900) ne tarit plus d’éloges sur l’exposition : « Jamais et nulle part, on n’a réuni autant de curiosités, de merveilles, d’attractions de toute nature, de spectacles éblouissants et somptueux, et les plus blasés, les plus sceptiques, en présence d’un ensemble aussi grandiose, sentiront leur cœur palpiter d’une patriotique admiration. »