Quand L'Humanité devenait communiste
En 1920, le congrès de Tours entraîne la scission de la gauche française. C'est aussi un moment décisif pour le journal L'Humanité.
Décembre 1920. À Tours, dans la salle du Manège jouxtant l'ancienne abbaye Saint-Julien, l'ambiance est électrique. En effet, au terme de ce congrès, le sort de la Section française de l'Internationale ouvrière va être décidé.
Pour comprendre ce qui se joue ici, du 25 au 30 décembre, il faut revenir à la fin de la Première guerre mondiale. Celle-ci a complètement bouleversé la classe politique française, et en particulier les partis issus du mouvement ouvrier. La SFIO, après l’assassinat de Jaurès le 31 juillet 1914, a en effet rejoint l’Union sacrée et a participé aux gouvernements pendant le conflit. La révolution bolchevik de 1917 va également grandement changer la donne.
Dès lors, le parti (issu de l’union en avril 1905 de plusieurs formations socialistes) va se décomposer en deux tendances opposées qui, lors du congrès de Tours, s’affrontent violemment. D’un côté la tendance dite des « majoritaires », celle de Marcel Cachin, Louis-Oscar Frossard et Charles Rappoport, qui souhaitent l’adhésion du Parti socialiste français au Komintern, l’Internationale communiste fondée en 1919 par Lénine, en acceptant les 21 conditions soumises par ce dernier. De l’autre, les « minoritaires », menés par Léon Blum et Marcel Sembat, qui rejettent l’adhésion.
Bataille rangée
Le quotidien L’Humanité est aux premières loges lors de cet affrontement. Depuis 1918, le « majoritaire » Marcel Cachin est rédacteur en chef du journal, ce qui traduit une prise de distance croissante à l’égard de l’Union sacrée. Avant le congrès de Tours, les rédacteurs se sont mis d’accord : chaque tendance aura le droit de s’exprimer dans les colonnes du journal.
Mais la tension est bien là. Curieux spectacle que celui d’un journal qui expose en toute transparence ses querelles internes… Le 7 décembre, le minoritaire Jules Uhry s'en prend à ceux qui voudraient accepter sans broncher les conditions imposées par Moscou :
"On nous apporta vingt et une conditions parmi lesquelles on nous impo...
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