Extrait du journal
à cet art une étude profitable à faire. Je parle souvent en ces chroniques de ce que j’appelle le don, et l’on me raille volontiers sur ce dada; on me demande en manière de blague ce quo j’entends par là, comme s’il y avait un don spé cial du théâtre ; comme si dans cet art, ainsi que dans tous les autres, il ne s’agissait pas d’avoir une idée d’abord; l’expression s’harmonisant ensuite d’elle-même avec la forme choisie. Eh bien! voilà un exemple des plus curieux. M. Marcel Prévost est assurément un homme qui a le don de l’observation et qui pense par lui-même ; il sait écrire, et les lecteurs de ce journal n’ont pas oublié les études curieuses et humoristiques qu’il a publiées ici sur les états d’âme de nos contemporaines; il est certain que beaucoup de ceux et surtout de celles qui le suivent avec un intérêt passionné, n’ont pas manqué de se dire plus d’une fois en lisant soit ses romans, soit ses dissertations morales : « Ce sont des scènes toutes faites ! Ah ! s’il se déci dait à écrire pour le théâtre I » Je suis convaincu que M. Marcel Prévost se le disait aussi tout bas. « Pourquoi ne ferais-je pas, moi aussi, du théâtre ? Je vaux mieux, certes et plus que tel ou tel, dont les pièces poussent gaillardement jusqu’à la centième. Il n’y a rien dans ces pièces ! Pas ombre d’observation ni de philosophie, ni de style, même ! Tandis que moi... si j’essayais... » Il vient d’essayer. 11 a donné les Demi-Vierge$. Allez au Gymnase, vous qui voulez vous rendre compte de ce que c’est que le théâtre 1 Vous com prendrez, en écoutant la pièce, que toutes les qualités du monde, curiosité d’observation, finesse de pensée, délicatesse de style, que sais-je? oui, tout cela et le reste, ne sert de rien, s’évanouit et disparaît entre les mains d’un homme qui veut le transporter au théâtre et qui n’a pas le don du théâtre, qui ne sait pas le théâtre. Ces Demi- Vierges, que voulez-vous que je vous dise? C’est un inextricable fouillis de scènes, d’où l’idée générale ne se dégage jamais. Les personnages, qui sont très nombreux, descen dent à la rampe, disent quelques mots dont on n’aperçoit pas la signification, dont le lien avec l’action échappe, puis remontent la scène, se croisent avec d’autres groupes, qui échangent également des propos vagues, formant des groupements inexpliqués. Qu’ii y ait par ci par là des bouts de scène, jolis comme des Forains, c’estce que je conteste pas. Un homme de la valeur de M. Marcel Prévost ne peut pas écrire trois actes sans rencontrer des coins de dialogue d’un osé très piquant, des mots aigus et même profonds. Mais ce qui est la dominante de l’ou vrage, c’est l’agacement que l’on éprouve à chercher le sens de toutes ces allées et venues ; c’est l’incertitude du sujet qui n’est pas ex posé....
À propos
Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.
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