Extrait du journal

« J'ai retrouvé toute ma voix, dit la missive; je danse de nouveau pour les étrangers qui me comblent de roupies et de présents. Mais je suis triste de ne pas revoir le « Sab » (1) français, qui m'a sauvé des voleurs et m'a appris les délices occidentales. Si Allah (lui seul est grand !) le permet et les Dieux hindous que je prie aussi malgré sa défense solennelle, j'irai à Singapour offrir encore au fugitif mes chansons, mes cheveux, mes caresses. En attendant j'ai dit au nuage qui passait sur ma tête, au vent qui va où il lui plaît, au rayon de soleil, — et au chamelier diligent porteur de cette cassette de transmettre au Français chéri un - peu du - battement de mon cœur. Et s'il n'a pas trouvé, dans ce pays au bord du Gange, une. complaisance qui ait su le réjouir, qu'il regarde l'Amie par qui ce message lui sera délivré! Elle est grande comme la voie lactée qui va de l'un à l'autre horizon, et elle est brune comme l'espace du firmament la nuit entre les innombrables étoiles. Je sais qu'il me remerciera pour l'es heures qu'il passera dans .ses bras. Qu'il lui dédie le présent qu'il eût donné à Luckmabaï! »...