Extrait du journal

il me permettait de tout imaginer autour de cette créature. J'aurais donc pu en tomber amoureux si je n'avais, une fois, été chez elle. Un soir, que me hantait la pire mélancolie et comme je m'étais attardé auprès des tombes, me grisant du philtre malsain de mon chagrin, le désir s'était emparé de moi d'une immédiate distraction. Je courus rejoindre An aïs et lui demandai à monter chez elle. Sans paraître surprise de mon humeur nouvelle, elle se mit en marche av:e;e moi, vers son logis. Et j'avoue que sa soumission, résultat de ses habitudes professionnelles, me glaça. Mais je ne l'en suivis pas moins et bientôt nous étions dans un infâme cul die sac, presque à l'entrée de l'avenue voisine. Je me souviens d'une grande plâtreuse bâtisse ; on pénétrait d'abord dans un couloir au bout duquel on rencontrait un escalier et, en s'éclairant d'un pâle rat de cave, on grimpait des marches nauséabondes, avec l'impression que par là déjà avaient passé et le Crime à l'œil faux et la Misère porteuse de maladies et la Fièvre aux mains toutes tremblantes et enflammées. Et une fois en haut, six étages gravis, on se trouvait devant la porte d'Anaïs. La clé mettait sa fleur de fer dans la serrure et la chambre de ma compagne apparaissait. La pièce était carrelée avec de pauvres murs dont le papier sentimental montrait des amours tenant des guirlandes. Il v avait une chaise, une toilette, un broc d'eau....