Extrait du journal

Le théâtre a joué un grand rôle dans la vie de Moscou. Aujourd'hui, c'est presque l'unique attraction qui subsiste dans cette ville qui n'a que peu de cinémas et point de cafés ou d'autres établissements où on puisse se distraire. D'autre part, à côté de ila nourriture spirituelle, on trouve au théâtre de quoi soutenir le corps. Les buffets, dont on ne peut approcher qu'après avoir acheté son ttillet, y sont littéralement assiégés. Un jour que j'étais venu par hasard au Théâtre Wakhtangoff une demi-heure avant le lever du rideau, il y avait déjà foule au buff-et. Bien rares sont les occasions où on puisse acheter quelque chose dans le commerce libre. L'argent a peu de valeur. Or, dans un buffet de théâtre, on a pour un rouble un gros morceau de pain avec du caviar. Le commerce ne court pas aujourd'hui en Russie après le client; il ne cherche pas à l'allécher avec des réclames qui se multiplient à tous les coins de rues. C'est, tout au contraire, le consommateur qui est à l'affût des fissures par où s'échappe la marchandise convoitée. Je ne sais pas par suite de quelles circonstances ces buffets sont mieux approvisionnés que plus d'une coopérative, mais j'ai l'impression que ce fait contribue grandement à rendre le public si assidu au théâtre. Peut-être, - est-ce le vieux système (éprouvé de l'Armée du Salut ? Une assiette de soupe et la parole de Dieu ? Le théâtre est, en effet, un instrument de propagande et on attache ici à tout ce qui concerne celle-ci une grande importance....