Extrait du journal

moine, dans la grande salle où notre ami M. Raymond Rognoni a nouvellement fixé sa fondation. Inauguration de locaux! va-t-on dire. Qu'on laisse donc, dans l'armoire aux vieux clichés, cette formule étroite et glacée ! Sous les branches du beau sapin où couraient mille girandoles, où se balançaient des centaines de jouets, où trônait un père Noël vêtu de blanc comme un chartreux et narquois comme un bénédictin en goguette, M. Edouard Herriot apporta l'indulgence de l'esprit et la lumière de l'âme. A ces « Enfants du Spectacle» — auxquels Comœdia consacrait officiellement son premier arbre de Noël — M. Edouard Herriot parla en homme et non en ministre, en père et non en censeur. Il eut pour leurs grandes joies et pour leurs petites misères les mots les plus vrais et les plus touchants. « Nous leur demandons des comptes, dit-il, alors que nous leur en devons tant. Dans la hâte de vivre, nous ne nous préoccupons pas assez d'écarter de leurs têtes innocentes des injustices qui, plus tard, seront d'autant plus cruelles qu'avec un peu de bonne volonté nous aurions pu les leur éviter. » Autour des paroles de l'ancien président du Conseil, il flottait une atmosphère étrange et délicieuse, où se rencontraient l'audace des temps modernes et le parfum biblique de cette autre époque où un autre, sorti du peuple aussi, s'écriait le premier à la face du monde : « Laissez venir à moi les petits enfants. »...