Extrait du journal

M. Joseph Bard , parti par le dernier cour rier d’Alger pour, de là, se rendre à Bûne et à Tunis, a bien voulu , avant de quitter Oran , nous adresser les lignes suivantes : VUE D’ORAN. La ville d’Oran est, a mon avis , dans l’Afrique française, la_ reine du pittoresque, de la couleur et de la poésie.— Où trouverez-vous, sur cette terre d'Algérie, plus de variété dans l’unité d’un merveilleux horizon, un site plus attachant, un caractère plus vivement accusé, le charme du souvenir aussi intimement mêlé au charme du paysage? —A Oran, vous avez, sous l’arche de la conquête française, deux fleuves coulant dans le même lit, sans confondre leurs eaux , deux vies parallèles, indépendantes dans leur type et libres dans leur essor ; la vie espagnole qui y date de loin par la tradition et les monuments, la vie musulmane qui y forme 1 élément indigène. Les Espagnols sont comme les Italiens et comme les Grecs, partout où ils ont passé se retrouvent d harmonieux vestiges, partout ils ont laissé dans les moeurs, dans les édiliccs, dans le souvenir des populations, 1 idée poétique greffée sur l'idée politique et militaire, la musique des yeux, les échos affaiblis du romancero, le sentiment du beau moral et idéal. La trace espagnole est reconnaissable en tous lieux, à la pensée de pompe, de majesté et de fierté qui se combine à ses harmonies. Oran était pour les enfants de l'antique Ilespérie un oasis africain où tout semblait prépare pour les recevoir; ils y vinrent avec joie, aussitôt que la conquête française leur en eut ouvert les portes. Quoi de plus naturel ! ils...