Extrait du journal

Des lettres que le Temps reçoit de SaintSébastien tracent un vif tableau de l’agita tion et du désarroi de la cour espagnole. On s’entretient de projets divers, qui tous accusent l’extrémité de la crise. Dans le cas, trop probable, où le mouvement ne pourrait plus être maîtrisé, la reine, dit-on, offrirait son abdication, et proposerait la régence du prince et de la princesse de Gir genti, son gendre et sa fille, ou même la succession de sa fille au trône, à l’exclusion du prince des Asturies, encore mineur. Si l’une et l’autre de ces propositions étaient rejetées, la reine, plutôt que de voir triom pher, soit la république, soit le parti de l’unification ibérienne avec le roi de Portu gal, soit sa sœur la duchesse de Montpeusier, abdiquerait en faveur du représentant de la légitimité espagnole, le prince don Carlos, qui vient d’épouser une princesse de Parme. On alléguerait la nécessité de sauver le principe monarchique et l’auto nomie de l’Espagne, et la reine ajouterait que, persuadée par une expérience de trente-six ans que la branche cadette ne pouvait prendre racine dans le pays, elle aimait mieux reconnaître les droits du chef de la famille, que d’être la cause de troubles prolongés, ou même de la perte de la monarchie. Une lettre de Madrid, du 21, dit que les habitants de la capitale jouissent toujours, malgré l’état de siège, d’une liberté com plète. Les cafés restent ouverts toute la nuit ; les officiers de l’armée y causent et fraternisent avec les bourgeois, et la police ne donne pas signe de vie. Les avis les plus dignes de foi s’accordent à nous représenter le gouvernement français comme disposé à garder, quoiqu’il arrive, la plus complète neutralité....