Extrait du journal
Bourges le 22 décembre. LA SEMAINE POLITIQUE Vendredi dernier une dépêche d’un journal an glais nous apprenait que le roi d’Annam avait été suicidé, étranglé, assassiné d’une manière ou d’une autre, qu’à la suite de cette révolution de palais, les mandarins hostiles à la France avaient pris la haute main, faisaient cause commune avec la Chine et que l’Annam tout entier se soulevait contre nous. La situation s’aggravait singulièrement, et pour faire face à celle difficulté nouvelle, le gouvernement demandait vingt millions aux Chambres, déclarait qu’il allait expédier G,000 hommes de renfort Le général Millot est chargé du commandement en chef de notre armée au Tonkin, car maintenant nous y aurons une petite armée ; presque vingt mille hom mes, et ce ne sera pas trop pour réduire un pays grand comme la Chine. La Chambre, quelques jours auparavant, avait volé neuf millions pour le Tonkin, du même coup elle avait, pour l’avenir, donné carte blanche an ministère, associé sa responsabilité à la sienne : le vote des vingt millions n’était plus qu’une consé quence du premier vole, et la discussion n’a pas été longue. Seulement il faut signaler un fort beau discours de Mgr Freppel, discours plus patriotique que politique qui. au nom du diapeau engagé, au nom de nos missionnaires de l’extrèine-orient, au nom des cinq cent mille annamites qu’ils ont con vertis, dit qu’il n'y avait plus à hésiter, qu'il fallait aller de l'avant et ne plus s’inquiéter de savoir eu • ■uelles mains était placé le drapeau de la France. On aurait peut-être pu répondre au vénérable prélat qu’il n’y avait pas rien que le Tonkin où nos mis sionnaires faisaient leur admirable propagande, mais qu’en Chine nous en avions beaucoup, et que la guerre avec le Celesle Empire pourrait bien, tôt ou tard, nuire singulièrement aux intérêts de la religion chrétienne de ce côté. Nous avions en Egypte une position politique de premier ordre, avec une colonie française de près de vingt mille âmes, sur un terrain où notre pays est attiré et retenu depuis près de cent ans parles intérêts les plus considérables ; or, il s est trouvé un ministère, il s’est trouvé une majorité pour livrer en 1882, ces avantages à l’Angleterre. Cependant lu même majorité lance aujourd’hui la nation française dans une aventure mille fois plus redoutable, à la conquête d’un pays où aucun Français n’ira jamais s’établir, et qui ne vaut pas par lui-même la dixième partie des sacrifices qu’il nous coûtera. De plus, on nous entraîne dans cette folie sans avoir consulté le Parlement à l’heure utile en pratiquant jusqu’à épuisement le système de la carte forcée ; après avoir nié effrontément que la Chine eût jamais songé à nous faire obstacle au Tonkin. yue l’expédition ne doive pas être coupée brusque ment, soit: mais n’est-ce pas assez déjà de voter les crédits la mort dans l’âme, et quelle nécessité y a-t-il d’ajouter à ces voles un témoignage de sympa thie ou u’inlérêt en faveur de ceux qui nous les demandent, le couteau sous la gorge?...
À propos
Initialement intitulé La République de 1848, le journal se rebaptisa Le Courrier de Bourges quatre années plus tard, en 1852. En 1872, le journal devint Le Courrier du Berry puis, de 1883 jusqu'à sa disparition en 1902, Le Messager du Cher. Il traitait en quatre pages de toutes sortes d’actualités (littéraires, agricoles, scientifiques et politiques) et soutenait une ligne favorable à ce qu’il nommait une « monarchie chrétienne et tempérée ».
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