Extrait du journal

Taisez-vous, me dit-on. Vous raisonnez comme un vieillard, affalé sur une borne de la route. Jusqu'ici, vous aviez réussi à cacher votre âge avancé. Mais maintenant la presse, qui sait tout, nous a révélé votre décrépitude. Vous- ne pouvez plus essayer de vous rajeunir. Tenez-vous coi : vous n'êtes plus de notre temps. Vous vous imaginez naïvement que tout ce qui s'est passé du vôtre a le privilège de l'éternité. Vous regardez, par exemple, comme intangibles des traités de paix qui ont déjà deux lustres et qui ne sont plus à la page. Nous autres, qui avons dans l'esprit une inépuisable provision d'avenir, nous autres qui ne nous plaisons pas à ramper dans la poussière des choses défuntes, nous autres qui somines de la génération des Costes et des Bello-nte et qui planons dans; le ciel au-dessus de toutes les médiocrités, nous n'avons pas, comme vouz, la superstition des signatures officielles. Nous ne restons pas bouche l)ée devant vos traités. Nous les con sidérons, au contraire, comme essentiellement perfectibles. Et d'ailleurs, à une époque où vous étiez moins près de la tombe, n'avez-vous pas dit vous-même, en une heure de bon sens, que la paix serait une création continue?...