Extrait du journal

plein bois, auprès d’une masure qui avait un aspect sinistre, et de se sauver ensuite en poussant de grands cris. Une heure après, oh trouvait Jacques renversé par terre, la tête sous ses bras, grelottant et convaincu qu'une bête féroce allait le dévorer. Le lendemain, il suivait de nouveau ses enuemis dans la forêt. C’était plus fort qae lui. S’il y avait un fardeau à porter, quelques jeux de quilles ou une corbeille Pleine de provisions pour un goûter sur herbe, on en chargeait ses petites épaules. Il pliait, mais il marchait. Malgré la frayeur que lui inspirait la solitude des bois. Jacques avait l’âme cou rageuse. On parlait quelquefois à Valserre ou dans les métairies voisines de chiens enragés qui s’étaient jetés sur des passants. Un matin, étant avec Jacques, je suivais un chemin de traverse qui menait au village. Un chien se présente, le poil hérissé, la mine hargneuse. La peur me. prend et mes jambes se mettent à trembler. Jacques soudain s’empare d’une branche de Dois mort et se campe devant moi ; le chien passe en grognant. J’étais plus morte que vive. Le chien hors de vue, Jacques jeta son bâton. — Mais, lui dis-je, si le chien t’avait dévoré? — Eh bien! répliqua-t-il, pendant ce temps-là tu te serais sauvée. Racontées dans nos réunions, ces aven tures prenaient bientôt des proportions épiques; elles nous semblaient formida bles. Ces rencontres de chiens errants sur la poussière d’un chemin et de vipères glissant sous l’herbe nous rappelaient le lion de Néinée et l'hydre de Lerne. La fa ble ne nous offrait rien de plus terrible. V XIII Sans que je pusse aisément m en ren dre compte à l’âge que j ’avais, je sentais que Paul m’aimait plus qu’il n’aimait Jenny, et j’en étais contente. Il avait pour moi rie menues attentions qui me touchaient, et après lesquelles je l’embrassais de bon xœur. Il rougissait quelquefois. J’ai eu...