Extrait du journal

— Faites entrer M. le baron au petit salon, dit-elle. — C’est fait déjà, répondit la servante, qui se retira. — Et moi, je me sauve, s’écria Mme Duparc, qui venait de se lever; la confé rence n’est-elle pas close, d’ailleurs? Elle prit Mina par les deux mains, la regarda un instant, puis l’attirant à elle par un mouvement vif et l’embrassant : — Un voudrait t’en vouloir, on ne le peut pas.... Toi, vois-tu, tu glisseras dans la vie comme un poisson dans Veau.,, Tandis que Mme Van der Flit se dirigeait vers une porte voilée d’un large pan de tapisserie qui fermait l’entrée du petit sa lon où attendait le baron Caucherel, un tourbillon sous la forme d’une jeune fille qui avait dans les yeux, dans le teint, dans le sourire la fraîcheur et la vivacité du printemps, pénétra dans la grande pièce, au milieu de laquelle le soleil traçait un sillon de lumière éblouissante, et, se jetant au cou de Mina, qu’elle embrassa sur les deux joues : — C’est moi, j’ai apporté mon ouvrage, et tu me garderas à déjeuner 1 Une expression de joie sincère, une sorte d’épanouissement éclaira le visage de Mina et en effaça le sérieux. — Chère Juliette, es-tu gentille de venir me surprendre ainsil dit-elle. Allons nous babiller 1 Et lui rendant coup sur coup ses deux baisers, elle l’aida à se débarrasser de sa mante et de son chapeau; l’attirant alors à sa suite dans le jardin, elle la fit asseoir auprès d’une table rustique où elle eut bientôt fait de placer sa corbeille, le ca» nevas, les pelotons de laine, les ciseaux, les étuis. Elle était redevenue jeune subi tement et trottait comme une souris. — Tout y est, je crois, reprit-elle, es-tu bien ainsi? Oui. Bon ! si tu as soif, voilà une carafe d’eau de groseille, et si tu as faim, voici des gâteaux... 11 ne faut pas que les petites filles manquent de rien ! Elle embrassa Juliette de nouveau et s’assit à son côté, un ouvrage de broderie à la main. Des fleurs les entouraient et la lumière qui perçait l’épais branchage d’un...