Extrait du journal

Je ne crois pas qu'il y ait de nation au monde où l'on aime, autant que chez nous, se récompenser entre soi. Ce ne sont que rubans, médailles et couronnes. Depuis le penseur de génie, tel que M. Renan qu'on a si bien fait d'éle, ver au grade de grand-officier, jusqu'à l'humble chef d'orphéon qui a fini par faire souffler .à peu près d'accord dans leurs cuivres trois douzaines d'amateurs, chacun a sa part. Quant à ceux qui dédaignent les récompenses honorifiques, ce dédain (à de rares exceptions près) est une forme de la vanité, moins naïve et moins franche qu'une autre et voilà tout. Un satirique à la façon du siècle dernier appellerait très bien Paris : Médaillopohs. Il semblait que l'austérité républicaine dût mal se prêter à ces mœurs et les « hochets de a vanité » allaient, disait-on, disparaître ? Depuis que nous sommes en République, on a simplement créé deux ou trois ordres nouveaux. Au ruban rouge, couleur de sang, on a ajouté le ruban violet, modeste comme la fleur qu'il rappelle et le ruban vert, espérance des agriculteurs. Je constate; je ne blâme pas. Loin de là. Quelque mal qu'on ait dit des distinctions honorifiques, quelque abus qu'on ait pu en faire, quelque trafic même, hélas ! le principe de l'institution n'est pas altéré....