Extrait du journal

Le souci de la température se mêle actuellement à tout ce qui, d'autre part, nous préoccupe. Le ciel qui nous aveugle et nous darde ses flèches de feu avec une sérénité olympienne, mêle sa torride influence à toute notre vie, à nous Parisiennesnon encore évadées de Paris, comme à la rustique existence des habitants de la lointaine province.L'azur est en fusion au-dessus de nos têtes, le pavé brûle nos pieds et le soir il se dégage de chaque coin de rue des relents à nous faire croire que décidément le règne de la peste est arrivé. Toutes les choses nous deviennent hostiles: la capitale, malgré le va-et-vient lourd des omnibus, le trottinement las des fiacres et l'infâme trépidation de ces puanteurs roulantes que sont les pétrolettes, devient un immense désert enflammé où les pierres se fendillent, les ardoises brillent et les quelques passants grillent. On ne s'y reconnaît plus, tout a changé : les cochers des Petites Voitures, que la chaleur devrait rendre hydrophobes, sont devenus polis - par suite de la raréfaction des clients, envolés vers les trous pas chers, ou tout simplement volatilises aux rayons du soleil....