Extrait du journal

J'ignore si le seul mot d'étu diant exerce encore sur les jeunes esprits de ce temps une influence dominatrice, un prestige invincible, mais je sais qu'aux jours où j'avais vingt ans (et plutôt les ai-je aujourd'hui deux fois qu'une) il représentait un monde d'idées tentantes et attirantes au possible. Mùrger avait écrit la Vie de Bohême et les légendes de Gavarni n'étaient pas oubliées. Etre étudiant, c'était avoir un béret rouge, une large culotte s'effilant aux chevilles, culotter une longue pipe, ne jamais payer ni son restaurateur ni son logeur, aimer de belles filles peu exigeantes et aller se faire refuser aux examens vers la mi-juillet. C'était encore danser le cancan dans les bals, faire la nique à la maréchaussée, railler les bourgeois et aller percher, au printemps, dans les grands arbres, comme les oiseaux. Quoi de plus séduisant et de plus irrésistible ? Et Musette ? Et Mimi ? Et ces faciles amantes qui adoraient, non le veau d'or, mais le veau aux carot-...