Extrait du journal

Ce devait être le grand événement de la saison que la reprise sensationnelle de la Vie Parisienne, aux Variétés. Sensationnelle, sans doute en ce qu'elle éveillait mieux qu'un simple intérêt, de curiosité : dans le cœur des gens d'âge, qui en 1866, avaient pu entendre Mine Honorine et Zulma Bouffair, c'était, en ce début d'avril, tout un printemps de souvenirs, tout un renouveau d'émotions qui se mettaient soudain à refleurir. Un printemps inquiet, certes, timide et mélancolique, mais charmant. Un souvenir de jeunesse restitué avec cette précision, c'est un peu, semble-t-il comme l'image d'une femme ai; mée vers la vingtième année, qu'on retrouverai, plus tard, beaucoup plus tard, au temps des rides, en fouillant par hasard au fond d'un tiroir oublié : le visage adoré jadis, immuablement fixé dans sa radieuse et lointaine ressemblance, d'éçoit d'abord par la différence entre la réalité du portrait et les imaginations de la mémoire ; puis il attriste par la coiffure et la toilette surannées ; puis à oontinuèr de le contempler, c'est tout le chemin de la vie qu'on refait à pas inverses, jusqu'à la jeunesse qu'on n'aurait pas cru déjà si loin. Et ce pèlerinage imprévu à tiravers le passé, pour décevant et douloureux qu'il puisse s'annoncer, n'est pas sans une douceur infinie, dont tpas un délicat ne voudrait rompre fenchantement voluptueux et cruel....