Extrait du journal

Le duel étant défendu par la loi française, qui y voit simplement un meurtre ou une tentative de meurtre, les personnes qui désirent se battre ont soin de laisser annoncer la chose dans les gazettes, où leurs témoins apportent le compterendu de la rencontre, afin qu'il soit bien établi qu'après le plaisir de faire des lois et des règlements sur toutes choses, nous n'en avons pas de plus grand que de ne pas les appliquer. Donc, ils sont revenus, les beaux temps du Pré aux Clercs, et la même journée a vu cinq duels s'engager ou se dénouer ! Les duels sont pour nous 4'un intérêt inégal, selon les causes qui les ont amenés. La politique a été la raison de deux ou trois de ces fâcheries et elle nous importe peu. Je dois cependant faire remarquer combien on a été injuste envers ce pauvre gouvernement, en faisant un bruit de tous les diables parce qu'il avait été chercher un homme dans l'administration d'un cercle pour en faire un diplomate. Ceci, je l'accorde, sortait un peu des coutumes ordinaires et des règles convenues. Mais combien cette nouveauté était philosophique ! Bien mieux que dans l'alcôve même, c'est au tripot qu'on apprend à connaître les hommes ; et quand on les connaît, il devient aisé de les manier. Mais nous sommes ainsi faits. Nous trouvons, en général, nos gouvernants ennuyeux, diseurs de banalités et encroûtés dans les routines ; et quand ils font quelque chose d'original, comme nous leur tombons dessus 1 Pourquoi diable ! ne serait-on pas un bon diplomate pour avoir été mêlé aux choses du jeu ? Fox était joueur, et Pitt aussi, et Cavour et Gambetta. Et c'est, je crois, un diplomate qui a divisé la société en deux camps : les hommes qui tirent à cinq et les hommes qui ne tirent pas ! comme chante Bertram....