Extrait du journal
Il vient de se passer au Théâtre-Italien un fait qui mérite qu'on s'y arrête et qu'on en tire. toute la leçon qu'il comporte. Lundi, à la veille de la première représentation de Aben-Hamet, l'opéra nouveau de M. Théodore Dubois, les choristes ont notifié à la direction qu'ils ne chanteraient point le lendemain, à moins qu'une somme de douze mille francs ne fût consignée dans une caisse publique, à titre de garantie de deux mois d'avance de leurs appointements. Notez qu'il n'était pas du un traître sol aux susdits choristes et qu'ils avaient même touché une avance de soixante francs sur leur traitement. La direction du théâtre refusa, comme de juste, de souscrire à cette inqualifiable pression, mais le compositeur, las des atermoiements déjà subis par son œuvre, désireux de ne pas manquer de parole au public et à la critique convoqués pour le lendemain, effectua le dépôt de la somme exigée, et la représentation eut lieu à la date fixée, comme vous savez. M. Théodore Dubois ., a bien fait de capituler, car il est des cas où le droit n'a qu'à s'incliner devant la force : mais, à présent, c'est au ThéâtreItalien et au public à prendre leur revanche du procédé employé par messieurs les choristes transalpins et à les mettre à tout jamais hors d'état de les renouveler. Le moyen est bien simple et tout indiqué : c'est de ne plus chanter désormais en italien au théâtre de la place du Châtelet mais tout bonnement en français. Tout le monde, — directeur, spectateurs, compositeurs, — gagnera à cette réforme : il n'y a que les choristes qui y perdront et, franchement, ils ne l'auront pas volé ! Voilà trop longtemps en effet, que sous prétexte de leur charabia natif, ils sont un embarras incessant pour la scène qui les emploie sans être, par compensation, une cause d'agrément pour les ereilles qui les entendent ou les yeux qui les regardent au-delà de la rampe. D'une médiocrité déplorable comme exécutants, ils sont, au point de vue plastique, d'un effet absolument désastreux. Il y a parmi eux un lot de visages, une série de jambes à donner le cauchemar aux plus indulgents : on se croirait en leur présence devant la galerie d'un Massacre de la foire, et quand sous le pourpoint de velours, sous la robe à traîne de satin ils figurent les seigneurs et les dameg des cours souveraines, ils feraient crier: Vive la République ! à M. de Gavardie lui-même, tant leurs mines sont rédhibitoires. Qu'on renvoie donc au-delà des monts ces malheureux et qu'on les laisse au filage de leur cher macaroni au lieu de leur faire filer des sons. Paris — et Toulouse suffiront bien à doter le théâtre de M. Maurel de gosiers sonores....
À propos
Fondé le 19 novembre 1879 par Auguste Dumont, Gil Blas détonnait parmi les publications du Paris fin-de-siècle. Sa ligne éditoriale grivoise, littéraire et ouvertement mondaine charmait ses lecteurs, souvent citadins.
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