Extrait du journal

L'infatigable Trublet qui, sous le nom de comte Vasili, compile depuis quelques années des notes recueillies çà et là, et le plus souvent à tort et à travers, sur la société des diverses capitales de l'Europe, s'occupe aujourd'hui de la société de Paris. Il publie un volume de quatre cent quatre-vingt-quatre pages, - un chiffre terriblement imposant! - sur ce qu'il appelle le Grand monde, oubliant qu'il n'y a plus à présent que les marchands de! cosmétiques pour se servir de pareille enseigne. L'ouvrage se présente sous forme de lettres adressées par le brave seigneur du boulevard Poissonnière à « un jeune ami », — ombre du vicomte d'Arlincourt tressaillez d'aise ! — et qui semble le produit de la collaboration de Mme Cottin avec M. Prudhomme. Dans la première de ces épitres, l'auteur s'inspirant des Exilés de Sibérie, raconte qu'il a écrit « ses Sociétés » avec une amie d'enfance « au culte de laquelle il n'a jamais failli, qui, à elle seule, était son rêve, son bien suprême, sa vie, et pouvait remplir pour lui le monde entier.» Cette amie, dit-il, « appartenait par sa naissance à ce noble faubourg,—savourez ce noble faubourg, — dans lequel, moi aussi, j'ai tant de parents, seul monde, d'ailleurs que je connaisse à Paris. » C'est donc dans ce monde, — le grand !—qu'il va nous introduire, à la suite de son amie, et pour nous prouver immédiatement sa compétence et nous montrer combien il possède le ton « de ce milieu parisien circonscrit », il commence par nous déclarer que « l'enfant du miracle était une nullité, grandi au milieu de nullités et époux d'une nullité » et qu'à la fin de sa vie, « c'était un grand enfant suranné, débitant de solennels lieux communs avec une bonne grâce joviale, mais qui devenait despote dès que surgissait une idée ne sortant pas de sa très médiocre provision personnelle. » Ah ! qu'au faubourg Montmartre on parle donc bien la langue du faubourg Saint-Germain et qu'on sait aisément se mettre au dia-...