Extrait du journal

.-"Je ne serais pas digne de mon nom de Colombine si, le cas échéant, je ne m'occupais de Pierrot. Mon ami Pierrot, je l'ai revu cette semaine, à l'Alcazar, dans la Revue qu'on y joue. Car j'ai été voir la Revue au café-concert, en partie de débauche, donnant pour raison à cette frasque que les Revues de cafés-concerts sont souvent plus amusantes que celles des théâtres, et excusée d'ailleurs par la mode. Les plus honnêtes gens aujourd'hui vont aux cafés-concerts, et les plus honnêtes dames bravent à la fois la fumée des cigares et les gaillardises des chanteurs. Les spectacles excentriques, de tout temps, ont ainsi attiré la bonne société. Le Tout-Paris d'autrefois allait à la foire Saint-Laurent, et entrait aux baraques. L'élégant chevalier de Florian raconte qu'un jour qu'il hésitait à monter dans une baraque de saltimbanques, il souleva légèrement la toile qui servait de clôture à la salle et aperçut un bas de soie bien tiré et guilloché d'or, ce qui le décida à pénétrer dans la baraque, où il trouva toute une société d'hommes de cour. De même, dans nos cafés-concerts, mêlés à la petite bourgeoisie du quartier, aux commis, aux humbles employés, on voit chaque soir de belles dames et d'élégants seigneurs, qui se divertissent parfois plus franchement qu'en des lieux de plus haute réputation et de tenue plus correcte. Je puis donc avouer, sans me compromettre, que j'ai été revoir Pierrot sur les planches hasardeuses de l'Alcazar....