Extrait du journal

L'affaire peut se ramener à ceci : M. Bernstein a pris place dans les lettres par des pièces de théâtre dont le point de départ est ordinairemcnt un fait divers passionnel ou financier. Il s'empare de cette banalité pour la traiter à sa manière qui est violente. Dans une action, poussée au noir, s'agitent des personnages aux lignes dûrement arrêtées. Leur intelligence est entièrement soumise à leurs instincts ; ils s'abandonnent aux plus mauvais, comme si la fatalité les condamnait au rut, au vol, à la perversité. Le public écoute, surpris ; mais, par ses procédés mêmes, l'auteur ne lui laisse pas le temps de réfléchir. Il lui offre, d'ailleurs, -la cinématographie, habilement réglée, du drame ou du scandale qu'il a lu, la veille, à la première page du Petit Parisien ou du Journal. Mais le style est meilleur, le relief plus vivant. Le public applaudit. La pièce fait de l'argent. Voilà M. Bernstein grand homme et célèbre ell France et à l'étranger ; encore plus peut-être à l'étranger qu'en France, parce que des mentalités moins affinées que la nôtre se plaisent aux outrances qui simplifient pour elles la eompréh-ension d'une pièce. Comptez aussi pour beaucoup le secret plaisir qu'éprouve un étranger à entendre parler et agir en fantoches ou en focbans, dee personnages que l'auteur présente comme des spécimens de l'élite sociale française. Car les protagonistes des œuvres de M. Bernstein sont, pour la plupart, ou « nés » ou riches, et, très souvent, les deux en même temps....