Extrait du journal
E rapporterai dans ces pages ce g ne fai vu et ce qui m’advint entre le 9 et le 22 juin 19^0. La première de ces dates est celle où je résolus de quitter Paris pour fuir l’invasion alle mande; la seconde, celle où j’y revins au terme d’un voyage de dix jours, aussi grotesque qu'affligeant. Né m un temps où la littérature naturaliste jetait ses derniers feux, j’ap partiens à une génération de journalistes qui, songeant sans répit à des romans qu’ils n’écriront jamais, prennent des notes sur tout événement marquant de leur existence, qu’il s'agisse d’un voyage à l’étranger, d’une dispute avec un patron, ou de l'abandon d’une maîtresse. J’ai donc pris des notes sur l’exode, et ces notes étaient destinées à jaunir lentement parmi d'autres notes, sans plus de chnnce de revenir jamais à la lumière qu’une circulaire ministérielle classée prr un fonctionnaire ordon né. Si je les rédige en ces jours anniversaires, c’est que les bombardements anglo.américains, dont les ravages passent parfois en une heure ceux que les hordes de Gens éric accumulaient en des années, provoquent de toutes parts de nouveaux exodest moins pittoresques, mais plus lugubres encore que le premier; que tel qui avait abandonné sa maison en juin s’apprête à l’abandonner en juin 4-fr> que tel autre qui devait retrouver à leur placet après des semaines et des mois d’éloignement, ses livres, ses pantoufles et ses pipes, n’a plus à lui, maintenant, ni une table, ni un lit. Or l'exode de 40 était gros des exodes de 44- Comme les sermons démocratiques de Mgr Verdier étaient gros des pleurs à la glycérine versés par les Gerlier, les Suhard, les Petit de Julleville sur les cadavres accumulés par les Anglais. Comme la reprise des Parents Terribles, en 19jt, était grosse du ballet de pédérastes dansé au Théâtre Edouard VII sur le dos de Racine. Nul n’est plus ridicule que le prophète du passé et je n’irai pas prétendre que favais prévu celti au moment où je cou chais dans les granges du Loiret. Mais s>il est vrai que le premier exode avait fait apparaitre dans toute sa crudité l’avilissement de l’Ame française et que nous payons à l'heure actuelle une persévérance de quatre ans dans cet amlisserr ent, on peut dire qu’une France qui eût mieux compris la cruelle leçon de juin 40 n’en serait pas aujourd’hui où elle en est. La seule consolation du philosophe, c’est de penser que les leçons de l’histoire, ces coups de pied aux fesses des nations, sont partout et toujours perdues. « Lorsqu’on a atteint quarante ans et * qu’on n’est pas absolument dépourvu de juge ment, écrivait Mallet du Pan, on ne croit pas plus à l’empire de l’expérience qu’à celui de la raison : leurs instructions sont perdues pour les gouvernements comme pour les peuples; et l’on est heureux de compter cent hommes sur une génération, A qui les vicissitudes humaines apprennent quelque chose. >...
À propos
Anticommuniste, profasciste, antisémite et positivement favorable à Hitler, Je suis partout est le journal d’extrême-droite le plus violent jamais publié en France. Si violent que son directeur Arthème Fayard, fondateur des éditions Fayard, décide dès mai 1936 de cesser sa parution. À sa mort en novembre 1936, le journal est toutefois relancé par son fils et Pierre Gaxotte, futur membre de l’Académie Française.
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