Extrait du journal

Saint-Quentin, le 12 octobre 1885. Les naturalistes racontent qu’en pré sence d’une inondation, par exemple, on peut voir, sur un tertre élevé, un mouton et un tigre se serrer amicale ment l’un contre l’autre, les chiens se rapprocher des chats et les serpents monstrueux regarder d'un œil attendri le timide lapin qu’ils auraient si bien trouvé de leur goût quelques instants plus tôt. Devant la marée montante du flot conservateur, radicaux et opportunistes font de même. M. Malézieux embrasse M. Ganault, qu’il déchirait hier; les fidèles du Glaneur font dès gentillesses à leurs frères ennemis du Guetteur, et il n’est pas jusqu’à M. Villain qui ne jette un doux regard dans la direction de M. Fitremann. Ces natures si diverses sont réunies dans un même sentiment par l’approche du danger et aussi par une commune colère qu’ils n’ont pas le soin de dissi muler. Chacun la manifeste à sa façon; d’aucuns inventent une lettre de Léon XIII au comte de Paris ; le Guetteur nous menace d’une guerre avec l’Alle magne, et les plus réservés, sentant re naître en eux le jacobin qui n’était qu’endormi, s’épuisent en menaces. Après s’être promis de dissoudre cette Chambre si elle n’est pas à leur convenance, ils ont parlé d’invalida tions nombreuses. A l’heure qu’il est, ils ne rêvent rien moins qtie d’appeler la force à leur aide. Nous disons plus loin ce que veut M. Ranc. Cet ancien communard est peu modeste : il veut tout ! Nous savions déjà que le radica lisme possédait des ministres à la fois propres à rien et capables de tout. Si nous en croyons M. Ranc, le but pour...