Extrait du journal

XVI (Suite). Ils arrivaient à la terrasse du côté qui regardait les jardins de la ville et les mou lins du Cambout. Et, se penchant un peu sur le mur, le commandant découvrit un morceau du chemin qui longeait la rivière; il saisit l’abbé par le bras et le força à se pencher comme lui. — Là, disait-il. C’est là. Est-ce que vous ne vous souvenez pas?... Ce grand Michel, le couteau dans le ventre... Ah! vous êtes arrivé trop tard, vous... Mais moi !... Sachez que ce spectacle n’a pas quitté mes yeux depuis plus de dix ans... Heureux ce qui ont la mémoire courte!... Là! Et vous voulez que le fils de celui qui reçut le couteau et la fille de celui qui le planta demeurent ici ensemble! Vous voulez que serrés l’un con tre l’autre ils se penchent comme nous sur le mur et qu’ils regardent le chemin !... Non ! non ! C’est assez qu’ils soient mariés puis que je n’ai pu l’empécher, puisque j’ai été moins fort que le destin ! — Mais, ait l’abbé, Frédéric Avrial savait que Jean Rosbras avait été accusé par de vagues rumeurs... — Pat la malignité! interrompit M. Desperriez, qui se mit â rire bruyamment. — Par la malignité ! Sans doute, et les ju ges n’en ont pas tenu compte. Il a pensé que ce n’était pas une raison pour rompre avec une personne qu’il aimait... — La fille de Jean!...