Extrait du journal

On allait les sacrifier ; on s'en servait depuis trop longtemps ; i! fallait- être - moderne... -se mettre «à la page », surtout.ne pas se laisser influencer par le sentiment, qui n'est plus à la mode. Ces vieilles choses qui venaient des parents, qui portaient, évidemment, la marque j d'une époque périmée, qui. croyait-on, s'har i monisaient mal avec les usages actuels, on lës I avait donc condamnées. On étouffait les scru pules en se disant qu'en rachetant du neuf on aiderait à la reprise des affaires, que l'argent était fait pour circuler, etc., etc... On appelait à soi tous les arguments menant à une déci sion que, secrètement, l'on désirait. N'enten dait-on pas répéter qu'il était indispensable de changer parfois de cadre, de modifier son « climat », de ne pas se confiner dans le passé, enfin de vivre avec son temps. Or nous sommes au siècle de la vitesse, notre œil n'en registre que des visions rapides et superposées. L'art lui-même s'est ingénié, hélas 1 à repro duire l'incessante succession de ces images rudimentaires : le rythme de nos travaux, de nos désirs, de nos affections s'est accéléré ; comment résister au courant ? Mais comment le suivre alourdi par le poids des souvenirs ? Allons ! c'est entendu, on va faire peau neuve, couper les racines, suivre la mode et changer comme elle....