Extrait du journal

M. Paul Reynaud poursuit avec un talent regrettable en l'espèce sa campagne en faveur de la dévaluation du franc. Il a, hier encore, dépensé des trésors d'érudition en matière de statistique pour démontrer que la situation économique des pays a monnaie dévalorisée était meilleure que celle des pays à monnaie d'or, et que la vie y était meilléur marché sans que la réduction des salaires payés en papier déprécié fût comparable. Donc, faisons comme eux. On peut toujours avoir pour soi la statis tique. C'est une science accommodante qui a des arguments pour toutes les thèses, pour peu qu'on sache parler et la faire, parler. M. le président du Conseil a pu contester, avec, tout autant de chiffres, ceux de H. Paul Reynaud. Les chiffres-ont letir■ éloquèhcé, mais l'éloquence est un art, élle n'est pas une science. A moins de se raccrocher-"à une « vérité révélée », comme celle'dont les socialistes se targuent d'avoir le monopole, il faut bien se contenter de. vérités plus ou moins démontrées. C'est donc à la logique qu'il faut recourir. « Nous devons, disait M. Paul Reynaud, aligner nos prix sur ceux du dehors, et le meilleur moyen pour aligner les prix, c'est d'aligner notre monnaie. Cette théorie simpliste a surpris. Comment, a de mandé M. Flandin, « aligner, notre mon naie sur des monnaies mouvantes » ? Pour s'aligner, il faut un point fixe : un caporal le sait. M. Flandin a refusé de s'engager sur ce terrain mouvant. Il a répété que l'équilibre entre les prix du dehors et les nôtres tend à se rétablir. L'écart se résorbe d'un côté par la hausse des prix mondiaux, de l'autre par la réduction du coût de la vie en France. Sans doute, ce double phénomène a une mar che lente, mais il n'y a pas de pire erreur et aussi de plus répandue que de croire que l'Etat peut faire des miracles et que l'économie dirigée dispose de procédés mystérieux pour résoudre la crise. C'est tout le contraire. On prolonge la crise-en ne la laissant pas évoluer norma lement, comme on prolonge une maladie niais non le malade par une médication désordonnée. Il est vrai que celle de M. Blum est plus simple. Il part d'une simple et forte remarque, que nous citons textuellement : « En régime, capitaliste, acheter est le seul moyen de consommer; là est l'énonciation la plus simple et la plus frappante du vice qui l'affecte. » Il est clair que tout irait mieux et -que la consommation serait plus active si l'on pouvait consommer sans payer. D'autres ont trouvé ce système avant M. Blum et le pratiquent à tous les étalages....