Extrait du journal

Il paraît que l'intrigue ne se tient pas encore pour battue. L'épreuve de jeudi ne lui a pas suffi; elle cherche aujourd'hui à atténuer la portée de l'éclatant échec qu'elle a subi en contestant l'exacti tude des chiffres; elle suppute les voix; elle ana lyse et décompose la majorité; mais elle ne re trouve au bout de tous ses calculs que la triste et irréfragable preuve de sa défaite. N'importe ; l'in trigue ne se décourage pas. Elle savait bien qu'elle serait battue sur le terrain de la discussion ; que dès qu'il faudrait se montrer, ses rangs s'éclairci raient ; que dès que le grand jour y aurait péné tré,, cette fantasmagorie d'Opposition s'évanouirait comme de la fumée. La publicité n'est pas son élément. Elle ne vit que dans l'ombre ; sa force est dans les ténèbres, dans le silence, dans le mutisme. Elle ne compte ni par les actes, ni par la parole, ni par le talent, ni par l'éloquence, ni par le courage; elle n'est qu'à la con dition de ne pas paraître. Aussi, battue à la lumière du jour, elle se promet de prendre sa revanche ailleurs, c'est-â-dire dans le scrutin se cret. Nous le savions déjà, et nous l'avions dit; nous savions que dès qu'il faudrait avoir la fran chise de sa défection, l'intrigue reculerait, et que sa seule force était dans l'hypocrisie et la dissimulation. Mais nous ne serions pas allés jus qu'à croire que non seulement elle l'avouerait, mais qu'elle s'en vanterait et s'en ferait une sorte d'honneur. C'est pourtant ce que fait aujourd'hui son journal officiel, et nous ce pou vons mieux faire que de citer : « La eause de cette contradiction, plus apparente que réelle, nous l'avons dite;-«Ue tient à la différence qui- existe dans la manière dont on vote, lorsqu'il faut écrire son bulletin sur une grande table ronde, sous le regard inquisiteur de ceux qui nous entourent, ainsi que cela a lieu dans l'intérieur des bureaux, ou lorsqu'il n'y a qu'à jeter deux boules, l'une blanche, l'autre noire, dans les deux urnes placées sur la tribune, à droite et à gauche, avec la certi tude de n'être pas vu. Dans le premier cas, on vote en réalité à bulletins ouverts ; dans le second cas seulement, on vote au scrutin secret. Or c'est au scrutin secret que se votera certainement celui des paragraphes et des amendemens sur lequel sera posée la question de cabinet. » Est-ce assez clair? Est-il possible d'avouer en termes plus dépouillés d'artiûce que l'intrigue n'aura le courage de ses opinions qu'à la condition de n'être pas vue? En public, on a des ménage mens à garder. On est sous des regards inquisi teurs , on écrit sur une grande table ronde ; qui sait? on a peut-être pris des engagemens qu'il faut au moins avoir l'air de tenir. Si l'on monte à la tribune, il faut s'expliquer, ce qui peut être assez embarassant; il faut produire un programme qui pourra vous être rappelé plus tard. Mais donnez à l'intrigue deux urnes, ave» une boule blanche et une boule noire, alolrs elle recouvrera toute son indépendance, alors elle donnera carrière en toute sécurité à ses rancunes individuelles, à ses mes quines envies, à ses petites vengeances honteuses. , Quel admirable éloge de nos institutions ! Que nous devons être fiers de voir le gouvernement parlementaire, ce gouvernement de publicité et de...