Extrait du journal

Les deux Chambres ont entendu hier la lecture de la déclaration ministérielle. Après quoi la Chambre des Députés, conformément à l'avis du gouverne ment, a voté le budget en maintenant ses précédentes résolutions. Le budget ainsi expédié a été porté au Sénat qui l'a renvoyé à la commission des financés. Puis les deux Chambres sont tombées d'accord sur un point : elles se sont mises en vacances jusqu'au 25 avril. A cette date et pendant les cinq jours qui s'écouleront jusqu'à l'expiration du quatrième douzième provisoire, le gouvernement s'efforcera d'amener la Chambre et le Sénat à mettre fin à leurs discordes budgétaires. Y réus sira-t-il? Nous le saurons à la fin du mois. D'ici là députés et sénateurs méditeront sur les graves paroles que le nouveau Cabinet leur a apportées en guise de viatique avant qu'ils ne se mis sent en route. La déclaration ministérielle que le Sénat a écoutée dans le plus profond et le plus respectueux silence, et qui, à la Chambre a recueilli quelques applaudis sements, n'appartient à aucun genre bien déterminé. Elle est d'un genre mitoyen cntro le discours .de distribution de prix, l'allocution politique à l'usage des cercles républicains de province, et la leçon de morale privée et civique destinée aux écoles primaires. M. Dupuy, M. Guérin, M. Terrier et leurs collègues n'ont évidemment pas eu l'ambition d'exprimer des idées politiques d'une grande portée, et encore moins de for muler un programme; mais une fois autour de la table du Conseil des minis tres, ils se sont appliqués à réunir une collection de pensées et de réflexions judicieuses et inoffonsives. Nous nous imaginons que chacun d'eux a contribué à l'œuvre commune. « Que la situation est difficile », a dit M. Dupuy...; « mais qu'elle est rassurante aussi », a conti nué M. Guérin. « Les épreuves dont nous sortons sont bien douloureuses », a repris le président du Conseil ; « mais la République en sort plus vigoureuse et triomphante », a fait observer le garde des sceaux.—« Une grande leçon s'en dé gage, a dit alors M. Charles Dupuy après s'être recueilli quelques instants, c'est que l'aisance et la fortune ne s'acquiè rent que par le travail et ne se conser vent que par la correction des mœurs et la dignité de la vie. » « Voilà une grande pensée fortement exprimée, a déclaré aussitôt M. Guérin; notons la tout de suite de peur de l'oublier, la Chambre et le Sénat seront ravis de l'entendre. » « Et plusieurs pourront en profiter, » a ajouté un étourdi. « Au nom du ciel, parlez plus bas t s'est écrié le président du Conseil. M. Cornélius Herz pourrait vous entendre. » Ainsi s'est poursuivie l'élaboration de la déclaration ministérielle, chacun payant son tribut, chacun apportant sa pierre au monument. Le dosage, qui est l'opération la plus importante et la plus délicate dans la composition d'un minis tère n'est pas moins de rigueur pour la confection d'une déclaration ministé rielle. Les nouveaux ministres ont donc dosé du mieux qu'ils ont pu. « Chaque jour le suffrage universel, consulté sur les points les plus divers, sanctionne les conquêtes qu'il a déjà faites et en ap pelle de nouvelles qui mettent progres sivement d'accord les aspirations démo cratiques et les institutions républi-...