Extrait du journal
La commission du budget émet des vœux, comme un simple Conseil d'arrondissement. Il est difficile de ne pas attribuer ce caractère au vote de jeudi dernier, par lequel elle a sup primé, à la majorité de 13 voix contre 7, notre ambassade auprès du Saint-Siège. Cette majo rité paraît considérable au premier aspect; mais, si on songe que la commission se com pose de 33 membres, et que, par conséquent, il en manquait i 3, tout juste le nombre de ceux qui se sont prononcés pour la suppression, on commence à se tranquilliser. Les mœurs de nos commissions sont bien connues : les radicaux et les socialistes ne manquent jamais de s'y rendre ; les autres mettent moins d'em pressement et de régularité à assister à leurs séances. C'est là une des plaies du parlementa risme, tel que nous le pratiquons. Toutes les protestations qui se sont élevées contre cette nonchalance des modérés n'ont servi à rien : on peut tout modifier, excepté les caractères. Il y a donc lieu de croire que les 13 membres manquants se composaient, en très grande par tie, sinon même exclusivement, de progres sistes, et que, s'ils avaient été là, le vote au rait été différent. Ce vote n'a, d'ailleurs nulle importance. Les radicaux se sentaient en force : ils ont voulu faire une manifestation, voilà tout. Ils savent bien que les choses n'iront pas plus loin, et, dans le fond de l'âme, la plupart d'entre eux s'en réjouissent. En veut-on une preuve? Ils l'ont donnée eux-mêmes immédiatement. En présence d'un vote que les convenances l'obli geaient à avoir l'air de prendre au sérieux, M. Georges Berger, rapporteur du budget des affaires étrangères, a donné sa démission. Aus sitôt, ses collègues, à l'unanimité, l'ont prié de la reprendre, au moins jusqu'à nouvel ordre. Nous connaissons le vote d'hier; mais quel sera celui de demain? La commission a décidé d'entendre M. le ministre des affaires étrangères ; il aurait été, de sa part, plus logi que de commencer par là. Sans doute, elle se laissera convaincre par les excellentes raisons que M. Delcassé lui présentera en faveur du maintien de l'ambassade, et, s'il en était autre ment, il resterait le recours à la Chambre ; car le rôle de la commission du budget se borne à faire des propositions. Le Parlement les adopte ou les rejette à son gré. Ce n'est pas à dire que la commission ne soit pas sortie de sa fonction naturelle et légitime en émettant le vote dont il s'agit. Elle a été nommée par la Chambre pour faire œuvre bud gétaire, rien de plus, c'est-à-dire pour mettre en équilibre les recettes et les dépenses, en les modérant d'ailleurs, les unes et les autres, le plus possible. Incontestablement, elle doit re chercher des économies, les indiquer, les pré parer ; mais à condition que ces économies ne portent pas atteinte au fonctionnement de nos grandes institutions et à la marche de notre politique générale. Ce sont là des choses qui restent hors de sa compétence : le mandat li mité qu'elle a reçu ne l'autorise pas à s'en ren dre juge, ni à essayer de les changer. En agis sant ainsi, elle empiète sur les attributions de la Chambre, et sa seule excuse est que ce n'est pas pour longtemps. Au surplus, il n'y a là rien de nouveau : à toutes les époques, la commission du budget s'est essayée à jouer au petit Parlement ; c'est un mal qui est sans doute dans la nature des choses, ou du moins dans la nature des hom mes, et dont il ne faut pas s'effrayer outre me sure, malgré les développements qu'il a pris depuis quelques années. Une Chambre qui a conscience de ses droits sait toujours remettre ses commissions à leur place et leur dire au besoin : .Ne sutor ultra crepidam. Mais ici une remarque s'impose. On sait que, malgré toutes les promesses d'économies, nos dépenses s'ac croissent d'année en année. On en gémit; mais on s'y résigne. Lorsqu'on recherche à quelles causes principales est due cette augmentation constante, une des premières qui se présentent est le vote inconsidéré par les Chambres d'un certain nombre de lois, faites le plus souvent dans un intérêt de popularité et sans souci des charges nouvelles qui en résultent pour le contribuable. Combien de ces lois ne vou-...
À propos
Fondé en 1789 sous le titre Journal des débats et décrets, le Journal des débats politiques et littéraires retranscrit, dans un premier temps, la quasi intégralité des séances dispensées à l’Assemblée Nationale. Sous Napoléon, il change de nom pour devenir le Journal de l’Empire. Publié jusqu’à l’Occupation, le journal sera supprimé en 1944.
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