Extrait du journal

la Bulgarie, rien de mieux, et c'est à cette tâche que la Russie devrait borner ses efforts. Elle peut être accomplie sans qu'il soit porté atteinte à l'intégrité de l'empire ottoman, sans détruire le droit de suze raineté de la Porte, sans exciter en rien les susceptibilités de l'Europe. On l'accomplira par des réformes modestes mais bien conçues , faites dans l'ordre civil et non dans l'ordre politique, mieux qu'en pro clamant des droits et en appliquant des institutions qui sont pour les popula tions des Balkans choses au moins très prématurées. Les intérêts des chrétiens seront infiniment mieux garantis si on les met sous la sauvegarde de l'Europe que si on les met sous la leur propre. Nous parlons de l'Herzegovine, de la Bosnie et de la Bulgarie; notre langage serait différent s'il s'agissait de la Serbie ou de la Roumanie. La Roumanie a mon tré, jusqu'à ce jour du moins, qu'elle était très capable de se gouverner elle même et de veiller à ses destinées. La Serbie formait également une agglomé ration intelligente et prospère, mais l'esprit politique lui a manqué et elle s'est follement jetée dans les aven tures. Elle doit se féliciter d'en sortir avec le statuquo ante iïettum. Une dépêche adressée de Berlin au Morning Post an nonce pourtant que la Serbie demande son indépendance complète, et que la Roumanie en fait autant. Si nous ne nous trompons, la Roumanie avait déjà élevé cette prétention; nous ne som mes pas surpris qu'elle la maintienne, mais nous le serions qu'on y accédât. Ne serait-ce pas" marquer trop claire ment à quelle fin tendent ces Constitu tions autonomes que l'on demande suc cessivement pour les diverses provinces de l'empire ottoman ? Ne serait-ce pas découvrir à tous les yeux la fiction par la quelle, en détachant ces provinces de l'empire, on prétend conserver son inté grité ? Le démembrement se ferait en deux opérations, l'une conduisant fatalement à l'autre, mais il se ferait à coup sûr ; et, lorsque chaque province aurait soustrait à l'empire jusqu'au tribut qu'elle lui paye, nous demandons ce qui resterait à celui-ci .de son intégrité nominale. Ce tribut est-il pour la Roumanie une charge si lourde? Gêne-t-il en rien sa liberté et même son indépendance? Est-il un prix trop élevé en échange de cette liberté dont il est la rançon convenue? Pour ce qui est de la la Serbie qui, suivant les convenances et les habitudes, doit payer à la Porte une indemnité de guerre considérable, nous comprendrions mal qu'on choisît cette occasion pour la dispenser de payer le même tribut qu'autrefois. De deux choses l'une : ou la Conférence se bor nera à régler la situation qui ressort de la guerre, ou elle cherchera à résoudre dans son ensemble la question d'Orient. Il nous semble que le premier rôle est suffisant. Si la Conférence .se laisse en traîner à jouer le second, ce n'est pas aux revendications de la Roumanie qu'elle devra s'arrêter, et son travail n'est pas sur le point d'être terminé....