Extrait du journal
Qu'avons-nous donc voulu ? Une chose bien simple et dont nous n'avons ni à nous excuser, ni à nous défendre. Ce n'est pas parce que le gouvernement allemand a jeté un trouble im prévu dans l'exécution de nos projets que nous les désavouerons. Ils ont consisté, tout en res pectant scrupuleusement la souveraineté du sultan, à lui prêter notre appui effectif pour des réformes que lui-même reconnaissait né cessaires, mais qu'il ne pouvait pas accomplir à lui seul. Il lui fallait le concours d'une puis sance disposant des ressources d'une civilisa tion plus avancée et plus exercée. Nous lui avons offert ce concours, et il ne l'a pas re poussé; il l'avait même partiellement ac cepté et il paraissait disposé à l'accepter entièrement, lorsque la diversion allemande s'est produite. La presse allemande nous a accusé d'avoir menacé par là son indépen dance ét sa souveraineté : nous le nions de toute notre force. Pourquoi l'aurions-nous fait? Notre empire colonial est assez grand déjà pour que nous n'éprouvions pas le besoin de l'étendre davantage; mais nous avions besoin d'avoir à l'ouest de l'Algérie une frontière paci fiée, et derrière elle un pays autonome, avec un gouvernement capable de se défendre contre les ennemis du dedans et du dehors. Tel a été, ou plutôt tel est notre but. La France était évi demment désignée pour remplir une tâche que son voisinage lui rendait plus facile, et dont le succès lui importait plus qu'à personne. Beau coup de bons esprits, chez nous, n'étaient pourtant pas sans appréhensions en son geant aux responsabilités à encourir. Us se demandaient si la charge ne serait pas très lourde dans le présent, pour un résultat loin tain, et destiné peut-être à rester longtemps incomplet. Les choses en étaient là lorsque l'éclat provoqué par l'Allemagne en a brusque ment suspendu le cours. Mais pourquoi dés avouerions-nous nos intentions dans le passé ? Et pourquoi ne persévérerions-nous pas à en réaliser tout ce qui en reste réalisable ? Le programme allemand, autant qu'il est possible de s'en rendre compte, a une partie économique et une partie politique. C'est d'a bord sur la première qu'il faut chercher la con ciliation, car elle y est plus facile que sur la seconde. L'Allemagne professe le principe de la porte ouverte au Maroc : nous aussi. Ce principe est prescrit dans nos arrangements avec l'Angleterre et avec l'Espagne : on ne sau rait donc nous reprocher de l'avoir méconnu. On n'a pourtant pas manqué de le faire en Alle magne, sans doute pour les besoins de sa polé mique : où trouver une autre raison ? Il est vrai qu'on a voulu quelquefois lui donner, dans la pratique, une extension qu'il n'a encore ja mais eue. Ce ne serait pas seulement la porte du Maroc qui serait ouverte à toutes les puis sances : l'égalité devrait'être strictement main tenue 'entre elles pour toutes l6s entreprises économiques et industrielles qui se produi raient dans le pays tout entier. C'est une con ception, une prétention nouvelle dans le droit des gens. Nous ne refusons pas de l'examiner ; mais il faut examiner aussi dans quelle mesure elle peut être réalisée sans porter atteinte à la souveraineté du sultan. Il y a là une limite à chercher, à trouver. Toutefois, d'une manière générale, les vues de l'Allemagne en matière économique méritent d'être prises en sérieuse considération. Nous 'étions sincères lorsque nous avons dit que toutes les puissances profi teraient, pour leur commerce et leur industrie, de l'oeuvre que nous entreprenions au Maroc, et que celles qui en profiteraient davantage sont celles dont l'industrie et le commerce se développent le plus.) Il n'a jamais, été dans nos intentions de nous réserver le marché du Ma roc et de le fermer aux autres. Nous avons désiré seulement que ce marché fût un marché tranquille, sûr, où on pût vendre et acheter autrement qu'à main armée, et où la police ne fût pas absente où fictive. Là est la question difficile, délicate, parce que l'organisation de la police soulève-des questions de force maté rielle, et se rattache par conséquent à des intérêts politiques.) Nous l'énonçons, nous ne la traitons pas aujourd'hui : l'occasion d'y...
À propos
Fondé en 1789 sous le titre Journal des débats et décrets, le Journal des débats politiques et littéraires retranscrit, dans un premier temps, la quasi intégralité des séances dispensées à l’Assemblée Nationale. Sous Napoléon, il change de nom pour devenir le Journal de l’Empire. Publié jusqu’à l’Occupation, le journal sera supprimé en 1944.
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