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Journal des débats politiques et littéraires, 16 octobre 1870

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Journal des débats politiques et littéraires
16 octobre 1870


Extrait du journal

de Paris, comme ils l'ont pu d'abord, mais autant qu'ils l'ont pu ; puis ouvertement et résolûment, dès que la porte de la dictature a été entrebâillée. C'est Paris qui a com mencé la résistance et qui l'a continuée sans relâche jusqu'aux élections de ISG9 ; c'est lui, par l'organe unanime de ses dé putés et par la voix des plus illustres d'en tre eux, qui a protesté contre la funeste guerre dont la dernière conséquence a été, contre son attente même, le siège et l'in vestissement de Paris. Cela ne veut pas dire que Paris avait ap prouvé et accepté les conséquences de la paix de 1866, vraie paix prussienne, impo sée à une partie de l'Allemagne par le négociateur victorieux. Non, le bon sens de Paris ne s'était pas trompé sur les suites d'une pareille paix. Ajoutons, comme on le disait ce matin avec tant de raison dans ce journal même, que « cet agrandissement subit de la Prusse avait créé dans la France entière un fond de jalousie inextinguible. » Mais la guerre, Paris avait l'instinct qu'on n'était pas prêt pour la faire. Tous ses députés le savaient et le disaient. M. Thiers, ni M. Jules Favre, ni aucun des organes accrédités de l'Opposition libérale de Paris ne voulaient engager dans une pareille aventure l'honneur de leur mé moire. On savait que la guerre était la con ception étourdie d'une intelligence éner vée, dans une de ces heures de confiance funeste qui avaient suivi le vote de la Con stitution réformée. C'était le fruit de la lune de miel du plébiscite. Paris s'était défié de l'unité allemande que l'Empire avait con tribué à faire ; il se défiait encore plus de la guerre imprudente et mai préparée qui avait pour prétention de la défaire. Maintenant, après avoir mis Paris, non pas hors de cause, mais à l'abri de tout .re proche exclusif et personnel, recherche rons-nous la part des provinces dans le désastreux résultat de tant de fautes ac cumulées par l'incapacité qui a dirigé nos affaires? Non, point de vaines récrimi nations, point d'injustes accusations. Nous l'avons dit : les peuples ne sont pas tou jours rigoureusement comptables de leur imprévoyance, quand il faut compter avec les grandes fautes et les grands dé sastres. Un homme peut être respon sable, s'il a tout dominé, tout conduit; une nation ne l'est pas au même degré. Mais enfin, qui a rendu la guerre possible, quand, conçue par une pensée dynastique dans le cerveau d'un orgueilleux qui s'est cru capable parce qu'il était tout-puissant, qui l'a rendue possible cette guerre ? La ré ponse est sur toutes les lèvres : la cause si non principale, du moins très déterminante de la guerre, c'est la complaisance qui en a accueilli la pensée chez les ministres de l'empereur, c'est la complaisance qui en a volé les moyens chez les députés, ceux de Paris et de quelques grands centres excep tés? Et ces députés, si enthousiastes ou si dociles en face d'un si formidable imprévu, qui les avait envoyés à Paris? Qui les avait acceptés, presque sans examen, des mains des pourvoyeurs officiels, chargés de les récolter dans nos campagnes ? Les provinces ont donc leur part, si in directe que nous la voulions faire, dans le malheur de Paris. Elles n'ont pas voulu la guerre plus que Paris; les correspondances des derniers préfets de l'empire, si com plaisantes qu'elles fussent, l'ont assez mon tré; mais Paris a moins contribué à la guerre que les provinces, puisque tous ses députés, tous ses journaux indépendans, toutes les intelligences libres dont Paris est le centre et le foyer, ODt protesté con tre la guerre, et ne l'ont acceptée, avec autant de loyauté que de courage, que lors qu'elle a été irrévocable. Paris n'avait pas la foi. Les provinces l'avaient presque par tout conservée. Paris recueille en ce mo ment les fruits de cette, fatale confiance qu'il ne partageait pas, confiance placée en d'indignes mains, qui n'ont su, au dernier | moment, que rendre une opée dont elle 3 ne s'étaient pas servies. Paris recueille ces tristes fruits de l'imprévoyance publique, et quand il demande à en partager l'amer tume et le poids avec les provinces, non, Paris ne demande rien d'injuste. P. DAVID....

À propos

Fondé en 1789 sous le titre Journal des débats et décrets, le Journal des débats politiques et littéraires retranscrit, dans un premier temps, la quasi intégralité des séances dispensées à l’Assemblée Nationale. Sous Napoléon, il change de nom pour devenir le Journal de l’Empire. Publié jusqu’à l’Occupation, le journal sera supprimé en 1944.

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