Extrait du journal

J'aime beaucoup à regarder les étalages des boutiques. Ce sont autant de livres ; ouverts. Je crois que chaque société, cha que époque s'avoue dans ses apparepces les plus banales, surtout quand elle a aussi peu que la nôtre le goût du secret. Le tout est de bien regarder. Me voici donc arrêté devant un grand magasin de cristaux, de faïences et de porcelaines. Cela brille et miroite, mais, à vrai dire, dans cette pa rade d'objets, je n'en aperçois pas un seul d'agréable. Les formes sont balourdes et sans naturel, les couleurs criardes. On voit des tasses jaunes à pois bleus, des tasses vertes à pois rouges. C'est qu'il s'agit ici, comme dans les arts d'aujourd'hui, d'ar rêter un passant pressé. Une sensation violente peut seule y suffire : qu'elle soit agréable ou non, cela importe assez peu. Mais regardons encore : il n'y a pas seu lement ici des pots et des cafetières, mais des objets d'un plus haut rang. Voici des vases qui prétendent imiter de près ce que produisent nos meilleurs artistes, les grès...