Extrait du journal

DE MOSCOU AU NIÉMEN Il n'y a pas encore tout à fait un siècle, vers la mi-octobre, la grande armée quittait Moscou : son héroïsme commençait à écrire la page la plus angoissante du grand drame napoléonien. Ces épopées centenaires, nous nous contentons aujourd'hui de les lire. Du moins, faisons-nous accueil aux faits nouveaux qu'on exhume, pour les donner en pâture à notre curiosité. Ce qu'autour du prince Eugène, un officier de sa garde, Césare de Laugier, avait vu de ses yeux et noté en marge de son calepin dé route, M. Henry Lyonnet vient de le traduire, pour la première fois, de l'italien. On y glane çà et là, d'alertes croquis et de poignants détails qui pré cisent les pathétiques récits de Ségur ou de Labaume, de Cambray ou de Guillaume de Vau doncourt. ; < V Dans le fond du tableau, c'est, Moscou qui brûle; et devant les flammes de l'incendie, c'est l'ombre des bonnets à poils, qui passe, c'est l'a silhouette noire des shakos, des bicornes et des drapeaux. A diverses reprises, lancé à la pour suite des incendiaires à travers les rues, dont le prince Eugène avait fait écrire, au charbon, les noms nouveaux, Césare Laugier fut bloqué par une mer de feu ; c'était, autour de lui, une pluie de tisons et de flammèches que le vent chassait. Il connaissait quel péril bravaient ses soldats dont les gibernes étaient remplies de cartouches. Adossé à un édifice qui brûlait, il y avait là un carrosse où dormait paisiblement un tambour...