Extrait du journal

de bien juger le gouvernement né de la Charte de 1814 sans une certaine dose d'esprit libéral, il est malaisé de lui rendre une justice complète avec un libéralisme à outrance. La Restauration veut être ju gée, comme tous les gouvernemens nés d'une trans action, dans son vrai milieu, dans sa vraie lumière. C'est pour avoir été trop souvent prise en dehors de ses conditions naturelles, qu'elle amassé tour à tour, sous la plume de ses historiens, de l'apothéose aux gémonies. Tâchons, si ce n'est pas nous flatter beau coup, d'éviter à la fois ces d'eux écueils. Pour moi, une chose m'attire à la première vue, pour ainsi dire, dans l'histoire de la Restauration; et qu'on me permette d'y insister, parce qu'évidem ment cette impression, qui est chez moi aussi sincère que profonde, n'est pas la première qui saisisse également tout le monde. Ce signe particulier qui me frappe aujourd'hui, en dépit des souvenirs mêmes et des préjugés de ma jeunesse, c'est le côté vraiment libéral de cette restauration monarchique qui, « renouant la chaîne des temps », comme elle le disait, et pouvant l'arrêter au point où la fureur ré volutionnaire l'avait brisée, la prolongeait pourtant, et sans en rien retrancher d'essentiel, jusqu'à cet .indes tructible anneau que l'esprit moderne avait forgé. Oui, c'est par là que la Restauration se distingue à mes yeux, précisément parce que c'est là le caractère qu'on pouvait croire (à tort sans doute) le plus anti pathique à sa nature : héritière de l'ancien régime, elle accepte l'esprit moderne, elle proclame et elle en registre soigneusement toutes ses conquêtes; elle re connaît tous ses droits. Elle faitplus : aux conquêtes de la révolution française, lettre morte si l'esprit ne les fait pas vivre, elle donne pour garantie, non pas un mot, quoique le mot même, comme le dit le vieux Caton dans Lucain (2), ait droit aux hommages de l'humanité, mais la chose; elle donne la liberté. Oh ! je le sais bien; quand on entre ensuite dans le détail des faits et quand on pénètre dans lè secret des affaires, on est fort tenté de rabattre par instans de cet enthousiasme qu'inspire à un esprit vraiment li béral la proclamation, dans une Charte monarchique, par un roi vieilli dans l'exil et rentré à la suite d'une coalition, de ces grands principes d'une révolution qui semblait vaincue et qui triomphé de sa défaite elle même : Les Français sont égaux devant la 10i... Ils sont tous également admissibles aux emplois civils et mili taires... Leur liberté individuelle est garantie... Chacun professe sa religion avec une égale liberté.;. Les Français ont le droit de publier et de faire imprimer leurs opinions... Toutes tes propriétés sont inviolables..-. ...