Extrait du journal
PARIS, 2o SEPTEMBRE. r. 'a • ■, ■ Nous essayons d'exprimer au jour le jour, dans ce journal, les opinions de la France et de défendre ses intérêts; non pas ses intérêts d'un jour et ses opinions d'une heure, mais les opinions qu'elle a professées et les intérêts qui ont été les siens pendant une suite de siècles et durant tout le cours, si l'on nous veut passer cette ex pression , de son développement histo rique. On ne saurait se placer à ce point de vue sans éprouver la plus vive et îâ plus ardente sympathie pour la Pologne, et sans souhaiter le succès de la lutte qu'elle a entreprise contre la Russie. Non que la Pologne nous ait pris plus que la Russie nos mœurs, nos sentimens et nos idées. SaintPétersbourg est ee que n'est pas Varsovie, une colonie française ; et d'un autre côté, Paris est plein de Russes. Mais de recevoir chez nous les Russes et de leur envoyer Chez eux nos modes «t nos ■eontrowsrce n'est pas une raison suffisante de croire que la grandeur de notre pays, sa sûreté, la pleine et entière satisfaction de ses plus nobles aspirations soient liées au progrès de la puissance moscovite. Cette puissance est devenue excessive à la suite d'un abus odieux de la force et d'un acte de tra hison : le partage de la Pologne. 11 n'en faut pas plus pour que tous nos vœux dans la lutte engagée sur les bords de la Vistule soient du côté des Polonais, et non du côté des Russes. Cependant, malgré notre pen chant déclaré pour la Pologne, les cir constances où se trouvent placées en ce moment l'Europe et la France font que nous nous sommes exprimés depuis une année moins en avocats de la Pologne qu'en simples et fidèles rapporteurs des accidens quotidiens de l'histoire européenne ; rap porteurs non pas indifférons, mais à coup sûr exempts de parti pris. On peut donc s'en fier à nous lorsque, essayant d'apprécier la situation générale de l'Europe, nous cab culons les chances d'une rupture entre la France et la Russie. Nous devons le dire : il n'.y a depuis six mois aucune, rail son sérieuse et définitive de croire que ces chances soient écartées. En vain les pacifiques, s'appuyant sur cette dé claration réitérée du Pays, que c'est l'ac cord des trois puissances qui peut seul pré cipiter l'Europe dans la guerre, s'en vont répétant partout que l'Angleterre et l'Au triche n'ont souci que de rester en paix avec la Russie, et que dès lors la France sera contrainte de se conformer à la vo lonté des deux cabinets de Vienne et de; Londres. Ces pacifiques trop obstinés li sent mal 7e Pays et lisent plus mal en core les journaux de l'Autriche et de l'An gleterre. Que disent, en somme, les jour naux autrichiens et surtout les journaux anglais? C'est que le langage de la Russie est intolérable ; que l'Angleterre néanmoins croit pouvoir le tolérer, mais qu'elle ver rait dé très bon œil que la France ne le tolérât point. Que dit de son côté le Pays ? Il dit que la France n'agira point contre le gré de ses deux alliées, et il ne dit rien de plus, Supposons maintenant que l'Autriche et l'Angle terre ayant prononcé leur verdict contre la Russie, mais se dispensait de l'exécuter elles-mêmes, chargent la France de cette mission et lui donnent' assurance qu'elle peut compter sur leur neutralié bienveil lante pendant tout le temps qu'elle pour suivra à l'égard de la Russie, par tous les moyens qu'élle jugera nécessaires, l'accom plissement des vœux et résolutions des puissances occideptaies. Nous n'examinons pas, pour le moment, si la France aurait tort ou raison d'accepter le fardeau que rejetteraient sur elle seule ses deux alliées. Mais si elle l'assumait , et même si elle offrait la première de l'assumer, qu'est-ce que cette résolution de sa part aurait de contraire au langage tenu par le Pays ? En quoi serait-elle incompatible avec le lan gage des journaux anglais ? Qui oserait dire que l'entente des trois puissances en serait rompue ou troublée? Qui ne voit qu'il y a telle conjoncture où l'entente des trois puissances peut aboutir précisément à ce résultat : à savoir que le gouvernement français se fasse soldat d'exécution de l'Europe en Pologne, comme il a jugé à propos de le devenir au Mexique? Telles sont les simples considérations que nous, croyons devoir soumettre au public, afin qu'il ne se dépèche pas de croire que « tout est fini», puisque c'est l'opinion que le Pays nous accuse de chercher à inculquer à nos lecteurs....
À propos
Fondé en 1789 sous le titre Journal des débats et décrets, le Journal des débats politiques et littéraires retranscrit, dans un premier temps, la quasi intégralité des séances dispensées à l’Assemblée Nationale. Sous Napoléon, il change de nom pour devenir le Journal de l’Empire. Publié jusqu’à l’Occupation, le journal sera supprimé en 1944.
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