Extrait du journal

Le Comité national conservateur, qui n'est, à notre avis, ni national ni conserva teui'j mais uniquement bonapartiste, vient de lancer son Manifeste pour les élections du 5 mars prochain, Comme l'attitude de leurs journaux nous le faisait prévoir depuis quelques jours, les bonapartistes chan gent de tactique électorale : ils ne parlent plus d'appel au peuple, ils dissimulent avec soin le drapeau de l'Empire; les voilà confondus avec le gros de l'armée monarchiste, pour laquelle ils n'avaient naguère qu'un dédain passionné! Leur nouvelle ambition est de marcher à la tête des conservateurs non républicains. L'isolement leur a fait trop de mal, ils veulent en sortir à tout prix. Mais ils savent bien qu'ils auront quelque peine à se faire accepter par les hommes dont ils étaient au dernier scrutin les ennemis déterminés ; aussi cherchent-ils à se glisser furtivement auprès d'eux à la faveur d'une panique générale. « La digue est rompue, s'écrient-ils, le flot monte et déjà se répand sur nos campagnes, qu'il menace de submerger, comme il a déjà submergé les villes! » Dans un si grand péril, quel légitimiste, quel orléaniste, quel républi cain modéré y regarderait à deux fois avant de se confier aux bonapartis tes déguisés qui lui tendent une dernière planche de salut ? Il faut se sau ver d'abord; et s'il arrive qu'on soit trans-, porté jusqu'aux rives peu hospitalières de l'empire par la frêle embarcation à la quelle on a été obligé de se confier dans la tourmente, n'aura-t-on pas du moins la, consolation d'avoir échappé au naufrage ?> Les bonapartistes ontl'habitude de spéculer sur la peur; mais leur jeu nousparaît cette fois trop marqué pour tromper personne. S'ils avaient été aussi victorieux qu'ils le prétendent aux élections du 20 février, ils ! n'auraient pas besoin de recourir à de pa reils subterfuges. L'abandon de l'ancien ! programme auquel ils semblaient si for tement attachés est un aveu involontaire « de l'étendue de leur défaite. Ne pouvant plus songer à l'appel au peuple et au ré tablissement prochain de l'empire, ils s'efforcent de prendre une place im-< portante, qui sait? la première, peut—être, dans l'Opposition antirépublicaine. Tio.ii— veront-ils,' parmi leurs adversaires : d'hier, dès hommes assez crédules pour accepter léur direction ? On doit tout at tendre de l'esprit de " parti , mais nous avons peine à croire que 1 ancien centre droit et l'ancienne droite poussent jusqu'à ce point l'oubli du passé et l'inintelligence de l'avenir....